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mardi, 23 mai 2023

L'Inde quintuple ses importations en provenance de Russie et demande à Londres de restituer ce que les Britanniques lui ont volé

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L'Inde quintuple ses importations en provenance de Russie et demande à Londres de restituer ce que les Britanniques lui ont volé

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/lindia-quintuplica-le-importazi...

La Russie est devenue le deuxième fournisseur de marchandises de l'Inde, derrière la Chine. Au cours du premier trimestre de cette année, les exportations de Moscou vers New Delhi ont dépassé 15,5 milliards de dollars, soit près de cinq fois plus qu'au cours du premier trimestre de l'année dernière. Un signe clair du non alignement du reste du monde sur les sanctions imposées par Washington et adoptées par les majordomes européens.

Au contraire, face aux protestations de Borrell - le représentant de la politique étrangère européenne et le génie qui a considéré Giggino Di Maio comme le meilleur candidat pour gérer les relations entre l'Europe et les pays du Golfe - sur les achats excessifs de pétrole russe par l'Inde, le ministre des affaires étrangères de New Delhi a rétorqué en invitant Borrell à étudier les règles européennes avant de répandre des âneries.

Car les idiots eurocratiques ont créé les conditions, grâce aux sanctions, pour acheter du pétrole russe mais en le payant plus cher. "Le pétrole russe, lui a rappelé le ministre indien, est largement transformé dans des pays tiers et, de ce fait, n'est plus considéré comme russe. Une farce, en somme. Que tout le monde connaît, sauf Borrell. Dans la pratique, la Russie continue de vendre du pétrole qui est traité au-delà de la frontière et qui acquiert la "nationalité" du pays de traitement qui le revend, à des prix plus élevés, à l'Ouest.

L'Inde et la Chine obtiennent quant à elles du pétrole à des prix réduits pour rendre leurs économies plus compétitives.

Mais les Russes ont également utilisé un autre stratagème. Ils ont transféré des hommes et des entreprises dans les anciens pays soviétiques d'Asie centrale. Avec la possibilité de produire et de commercer tranquillement avec tous les pays du monde. Et de "réexporter" ensuite vers la Russie ce dont ils ont besoin.

C'est ainsi, entre autres, que l'on fait croître les économies des pays voisins, renforçant le front des "non-alignés", même si ce front se rapproche de plus en plus de Pékin.

Quant à l'Inde, sollicitée par tous dans l'espoir de lui attribuer une fonction anti-chinoise, elle continue à penser principalement à ses propres affaires, profitant de la cour rapprochée que lui font les Russes et les Atlantistes, voire les Chinois eux-mêmes. Et elle a renchéri. En demandant à Londres de restituer tout ce que les Britanniques ont volé pendant la période coloniale. Car il est curieux que les défenseurs atlantistes des droits et de la légalité oublient toutes les valeurs et les bons principes lorsqu'il s'agit de les respecter.

dimanche, 14 mai 2023

L’aube de l’Inde-monde

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L’aube de l’Inde-monde

par Georges FELTIN-TRACOL

Selon l’ONU, le 1er mai dernier, la République populaire de Chine a perdu sa première place d’État le plus peuplé de la planète au profit de son voisin et rival asiatique, l’Union indienne. D’après des statistiques plus ou moins fiables, l’Inde compterait un milliard cinq cents millions d’habitants et la Chine un milliard quatre cents millions. Au-delà de l’aspect quantitatif, il est évident que le dynamisme démographique joue en faveur de la Nouvelle Delhi.

La Chine paie dès à présent les quatre décennies de politique implacable de l’enfant unique. Elle est parvenue à contenir la croissance de sa population si bien que la société chinoise commence déjà à vieillir. Les mesures délirantes du zéro covid sont une conséquence immédiate de ce vieillissement. La question des retraites à venir dans une société pas encore opulente risque de déstabiliser le monopole politique du Parti communiste chinois à l’horizon 2040.

Malgré des tentatives parfois autoritaires de réduction des naissances dans les décennies 1960 et 1970, l’Inde semble poursuivre une augmentation humaine inexorable. En réalité, la fécondité des Indiennes a fortement diminué grâce aux retombées effectives de l’essor économique. Toutefois, le volume humain est si ample que naît chaque année une douzaine de millions d’enfants dans un État qui n’a que 3.287.263 km².

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L’Inde est la clé de voûte du sous-continent éponyme qui compte le Pakistan, le Népal, le Bhoutan, le Bangladesh et le Sri Lanka, voire le Myanmar. Elle se projette aussi sur les autres continents quand on s’intéresse à sa diaspora. L’Indonésie, la Malaisie et Singapour accueillent des Indiens dont les aïeux sont venus s’installer à l’époque de l’Empire britannique. Des communautés indiennes anciennes résident en Afrique du Sud et en Afrique orientale (Kenya, Ouganda, Tanzanie), sur l’île Maurice et dans le département français ultra-marin de La Réunion.

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Cette présence suscite parfois des conflits. Les Tamouls de confession hindouiste ont longtemps revendiqué par les armes un État indépendant au Nord et à l’Est du Sri Lanka contre l’avis des Cinghalais bouddhistes. La question indienne a durablement perturbé la vie politique des Fidji dans l’océan Pacifique. Les nationalistes mélanésiens fidjiens ne supportaient pas la mainmise économique indienne sur l’archipel, d’où une série de coups d’État à la fin du XXe siècle. Cela n’empêcha pas qu’en 1999, le travailliste indo-fidjien Mahendra Chaudhry devienne le chef du gouvernement.

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Les Fidji anticipaient une situation qui se reproduit maintenant dans le monde anglo-saxon. Le deuxième Premier ministre du roi Charles III est depuis octobre 2022, Rishi Sunak, premier hindouiste à occuper le 10, Downing Street. Si on considère les Pakistanais comme des Indiens de religion musulmane, le nouveau Premier ministre écossais s’appelle Humza Yousaf. Quant à la République d’Irlande, son Premier ministre, Leo Varadkar, a un père d’origine indienne. Au Canada, le principal animateur du NPD (Nouveau parti démocratique, une formation de gauche wokiste), Jagmeet Singh, est sikh ! L’actuelle vice-présidente des États-Unis d’Amérique, Kamala Harris, est jamaïcaine par son père et... indienne par sa mère.

Benjamin Disraeli rêvait de transférer la capitale de l’empire mondial britannique de Londres en Inde. Son désir se réalise en partie aujourd’hui avec l’arrivée au pouvoir des petits-enfants des colonisés de naguère. Les eaux de l’Indus et du Gange se mêlent à celles de la Tamise… Les Indiens peuvent pleinement se fondre dans l’Anglosphère puisqu’ils parlent couramment la langue anglaise et connaissent par cœur les codes anglo-saxons. Ils savent s’intégrer dans une mondialisation libérale américanomorphe bien mal en point. 

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Les Occidentaux gardent toujours en tête les images de bidonvilles de Calcutta où officiait Mère Teresa. Ils imaginent l’Inde en pays sous-développé avec ses millions de pauvres. Certes, la pauvreté n’a pas disparu. Cependant émerge et s’affirme une importante classe moyenne. Le groupe Tata détient les marques automobiles Jaguar, Land Rover et Hispano. L’industriel et homme d’affaires Lakshmi Mittal s’occupe d’Arcelor Mittal. L’Union indienne deviendra bientôt la troisième puissance économique mondiale. L’Inde ne dispose pas d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. Elle pourrait remplacer avec satisfaction le Royaume-Uni, ce caniche atlantiste !

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Puissance nucléaire et civile, l’Inde maîtrise en outre les techniques aérospatiales avec sa base de lancement de fusées de Satish-Dhawan. Si Bangalore est la capitale informatique du pays, l’ancienne Bombay devenue Mumbay reste sa première place financière. Les studios de tournage et d’enregistrement qu’abrite cette mégalopole, « Bollywood », fournissent une grande partie de l’Asie et du Moyen-Orient en productions cinématographiques, télévisées et musicales.

Au pouvoir depuis 2014, le BJP (Parti du peuple indien) de Narendra Modi déroule une politique nationale-conservatrice libérale en économie. L’insistance gouvernementale à propager la numérisation des services publics et des activités marchandes constitue un indice préoccupant d’inclination sociétale vers un crédit social à la chinoise.

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État-continent tendant vers un État civilisationnel potentiellement illibéral, l’Inde du BJP applique avec méthode son programme d’Hindutva. Or les quelque 800 langues usitées, la diversité des groupes ethniques et religieux et la permanence du système des castes malgré son interdiction constitutionnelle freinent les avancées d’une société unifiée par la couleur safran. Les nationalistes indiens se méfient par ailleurs des prosélytismes musulman et chrétien et surveillent l’activisme sikh en faveur d’un État sikh indépendant dans le Pendjab.

La politique gouvernementale indienne recèle enfin sa part de contradictions. L’Inde appartient à l’OCS (Organisation de coopération de Shanghai) qui comprend ses rivaux chinois et pakistanais. Proche d’Israël et hostile à l’islamisme politique, la Nouvelle Delhi entretient d’excellentes relations avec l’Iran et les Émirats arabes unis. Fidèle cliente en armement russe, l’Inde discute dans le cadre du « Quad » avec le bloc occidental atlantiste (États-Unis, Grande-Bretagne, Australie, Japon) afin de contrecarrer le « collier de perles » portuaire de la Chine dans l’océan Indien. Mais la patrie du non-alignement répugne à rejoindre clairement une alliance ou une entente exclusive. Elle préfère jouer sur les rivalités géopolitiques dans l’espoir d’en retirer le maximum de bénéfices. Ainsi vend-t-elle plus chers aux Occidentaux des hydrocarbures russes qu’elle a à peine reconditionnés.

Quelques oracles mentionnent un XXIe siècle chinois qui succéderait au XXe siècle étatsunien. D’autres parient sur un XXIe siècle indien du fait de la jeunesses de sa population. Conscients à la fois de ses forces indéniables, de ses atouts indiscutables, de ses faiblesses chroniques et de ses failles structurelles, les dirigeants indiens recherchent en priorité non pas une  « grande politique » d’envergure intercontinentale, mais plutôt le contentement régulier des besoins élémentaires de leur population. C’est leur défi ! S’ils réussissent, ce sera alors un immense succès. Mais, pour l’instant, l’Inde-monde demeure toujours balbutiante.

 

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 73, mise en ligne le 9 mai 2023 sur Radio Méridien Zéro.

vendredi, 12 mai 2023

La Chine exhorte les États-Unis et l'OTAN à financer la reconstruction de l'Afghanistan

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La Chine exhorte les États-Unis et l'OTAN à financer la reconstruction de l'Afghanistan

Source: http://www.elespiadigital.com/index.php/noticias/historico-de-noticias/40614-2023-05-04-18-24-35

DOHA (Sputnik) - L'envoyé de la Chine pour l'Afghanistan, Yue Xiaoyong (photo), a affirmé que les Etats-Unis et les autres pays de l'OTAN, qui ont envahi pendant des années ce pays d'Asie centrale, devraient financer sa reconstruction.

"Les États-Unis et les pays de l'OTAN, qui ont occupé l'Afghanistan pendant deux décennies, doivent prendre en charge la reconstruction de l'Afghanistan", a déclaré M. Yue à Sputnik.

Le diplomate chinois a assisté à la réunion du secrétaire général de l'ONU, António Guterres, avec les envoyés spéciaux pour l'Afghanistan d'une vingtaine de pays, les 1er et 2 mai à Doha, au Qatar.

M. Yue a indiqué que plusieurs délégués présents à la réunion ont fait valoir que les États-Unis devraient financer la reconstruction de l'Afghanistan après des années d'invasion, et ont demandé le déblocage des fonds destinés à ce pays d'Asie centrale.

"De plus en plus de pays s'expriment sur les avoirs afghans et les États occidentaux ont du mal à ignorer ces préoccupations. Les avoirs afghans, qui s'élèvent à 7 milliards de dollars, doivent être dégelés", a-t-il souligné.

Les participants aux consultations de deux jours organisées sous l'égide des Nations unies ont abordé les problèmes humanitaires de l'Afghanistan, ainsi que les moyens de renforcer la stabilité dans le pays.

En ce qui concerne la reconnaissance éventuelle du gouvernement afghan dirigé par les talibans, l'envoyé chinois a souligné que son pays n'avait pas l'intention de le faire.

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"Pour la Chine, la question de la reconnaissance du gouvernement mis en place par le mouvement taliban n'est pas à l'ordre du jour dans l'immédiat, mais cela ne signifie pas que nous ne devrions pas prendre contact avec les autorités afghanes", a-t-il déclaré.

Il a ajouté que l'Afghanistan, après 20 ans d'occupation américaine, avait désormais la possibilité de prendre son destin en main.

"Nous respectons l'Afghanistan, sa souveraineté et son intégrité territoriale, mais la Chine a besoin de temps pour voir comment ce pays sort de la situation chaotique dans laquelle il se trouve après 20 ans d'occupation américaine (...) Il doit rompre avec les groupes terroristes d'une manière crédible", a-t-il déclaré.

M. Yue a insisté sur le fait que chaque pays doit résoudre séparément la question de la reconnaissance du gouvernement afghan. Pour la Chine, a-t-il souligné, la priorité à ce stade est d'aider le peuple afghan, et non de reconnaître le gouvernement.

Les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN ont envahi l'Afghanistan en 2001 sous le prétexte de lutter contre le terrorisme.

Le mouvement taliban (soumis à des sanctions de l'ONU pour activités terroristes) a repris le pouvoir en Afghanistan le 15 août 2021, après la fuite du président Ashraf Ghani, soutenu par les États-Unis et d'autres forces de l'OTAN. Deux semaines plus tard, les troupes américaines se sont retirées de l'Afghanistan de manière chaotique après près de 20 ans d'invasion.

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L'ONU qualifie la crise humanitaire en Afghanistan de plus importante au monde

ONU (Sputnik) - Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a qualifié la crise en Afghanistan de plus grande crise humanitaire au monde.

"Il est difficile d'exagérer la gravité de la situation en Afghanistan. C'est la plus grande crise humanitaire dans le monde aujourd'hui", a déclaré António Guterres à la presse à Doha après une réunion des envoyés spéciaux pour l'Afghanistan.

Selon le Secrétaire général des Nations Unies, 97% des Afghans vivent dans la pauvreté.

"Les deux tiers de la population, soit 28 millions de personnes, auront besoin d'une aide humanitaire cette année pour survivre", a déclaré M. Guterres.

Il a ajouté que six millions d'enfants, de femmes et d'hommes afghans sont au bord de la famine.

"Dans le même temps, les fonds disparaissent. Notre plan d'intervention humanitaire, qui est censé mobiliser 4,6 milliards de dollars, n'a reçu que 294 millions de dollars, soit 6,4 % du montant total nécessaire", a-t-il déclaré.

Le secrétaire général a également révélé que la majorité du personnel de l'ONU dans le pays était composée d'Afghans.

"Beaucoup d'entre eux sont des femmes. L'interdiction faite aux femmes afghanes de travailler pour les Nations Unies et les ONG est inacceptable et met en danger la vie des gens", a-t-il souligné.

M. Guterres et les envoyés spéciaux pour l'Afghanistan de plusieurs pays, dont la Chine, les États-Unis, la France, l'Inde, le Pakistan, le Royaume-Uni, la Russie, l'Union européenne et l'Organisation de la coopération islamique, se sont rencontrés à Doha.

La réunion visait à trouver un terrain d'entente sur des questions telles que les droits de l'homme, en particulier les droits des femmes et des filles, la gouvernance inclusive, la lutte contre le terrorisme et le trafic de stupéfiants.

L'Afghanistan a plongé dans le chaos après la fuite du président Ashraf Ghani le 15 août 2021.

Le mouvement taliban (soumis à des sanctions de l'ONU pour activités terroristes) a pris le pouvoir, mettant fin à deux décennies de conflit armé avec le gouvernement, qui était soutenu par les États-Unis et d'autres pays de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN).

La chute de Ghani précipite le départ chaotique des troupes américaines qui avaient envahi l'Afghanistan en 2001 sous le prétexte de lutter contre le terrorisme.

Début septembre 2021, les talibans ont formé un gouvernement intérimaire dont la moitié des membres figuraient sur la liste des sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies.

mardi, 02 mai 2023

Les Philippines répondent également aux défis géopolitiques de l'Asie du Sud-Est

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Les Philippines répondent également aux défis géopolitiques de l'Asie du Sud-Est

par Peter W. Logghe

Source: Nieuwsbrief Knooppunt Deltapers - N°179, avril 2023.
 
Dans une édition précédente, nous avons parlé de ce géant silencieux et inconnu de l'Asie du Sud-Est, l'Indonésie (http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/03/17/l-indonesie-invisible-mais-presente-dans-le-pacifique.html). Mais vous pouvez également classer les Philippines, un archipel de 7641 îles et de 100 millions d'habitants, dans la même catégorie. Avec quelques différences notables, bien sûr: l'Indonésie est le plus grand pays musulman; les Philippines sont un pays majoritairement catholique. Si l'Indonésie menait une politique étrangère indépendante, non alignée, les Philippines étaient généralement un partenaire militaire des États-Unis.

Les Philippines ont été placées sous contrôle espagnol après leur découverte par Magellan. Après plus de 300 ans, la présence espagnole aux Philippines a pris fin. En août 1896, une révolte philippine a éclaté et a été perdue par les Philippins, car certaines réformes promises par les Espagnols n'avaient jamais été mises en œuvre. Lorsque la guerre hispano-américaine éclate en 1898, les rebelles philippins saisissent leur chance et jouent la carte des États-Unis. Les Philippines sont alors devenues une colonie américaine après la défaite définitive de la rébellion philippine, qui s'était également retournée contre les Américains, dans une deuxième phase. En 1946, les Philippines sont devenues indépendantes, mais l'ancien colonisateur a pu conserver ses bases militaires dans l'archipel.

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La dictature de Ferdinand Marcos (photo) est brève : les premières années ont été marquées par d'importants investissements dans les infrastructures, mais rien ou presque n'a été fait pour lutter contre la pauvreté qui régnait au sein de la population. En 1972, Marcos a déclaré la loi martiale car, selon le président, une double menace, portée par des rebelles communistes et par un mouvement séparatiste islamique, pointait à l'horizon. Le Parlement a été renvoyé chez lui et les médias ont été limités. De nouvelles élections ont eu lieu en 1986, que Marcos disait avoir remportées, mais un soulèvement populaire l'a poussé vers la sortie et son rival, la veuve Aquino, est arrivé au pouvoir. L'euphorie fut grande, mais elle disparut tout aussi rapidement. La corruption dans le pays restait élevée, les conséquences de la criminalité liée à la drogue s'y ajoutaient. C'est dans cette atmosphère qu'un personnage comme Rodrigo Duterte a fini par remporter les élections, avec un programme dans lequel il proposait des mesures drastiques pour réduire la criminalité - ce que les organisations de défense des droits de l'homme ont immédiatement critiqué. En outre, en 2020, Duterte a annoncé que les Philippines poursuivraient désormais une voie plus indépendante vis-à-vis des États-Unis : jusqu'à cette date, les Philippines avaient toujours été un facteur de sécurité pour les États-Unis en Asie du Sud-Est, un peu dans le sens que le Japon donnait aux mots "partenariat militaire".

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Les Philippines sur une voie chinoise ?

"Au sein des services militaires et de sécurité des Philippines, les avertissements n'ont cessé de tomber, arguant que Duterte était un homme de la Chine, et que sa carrière politique (il a d'abord été maire de Davao, la troisième ville de l'archipel) avait été activement soutenue par la Chine", ont déclaré certains officiers militaires philippins à l'hebdomadaire conservateur allemand Junge Freiheit.

"Chaque fois que la Chine prenait possession d'un territoire philippin dans les îles Spratleys, il n'y avait aucune réaction du côté de Duterte. Cela a provoqué de l'irritation au sein de l'armée, a déclaré l'officier 'Michael', cité par le journal. "Duterte a accordé l'amnistie à des figures de proue de la Nouvelle armée populaire maoïste (un mouvement de guérilla communiste dans l'archipel), ce qui a également provoqué des inquiétudes au sein de l'armée."

Dans cette guerre tranquille avec les Etats-Unis, la Chine a développé des réseaux civils aux Philippines, parmi lesquels TikTok, le portail vidéo chinois, mérite certainement d'être mentionné. C'est surtout aux Philippines que ce canal d'information développé pour l'entreprise Bytedance Technology Limited, détenue par Pékin, a connu une croissance exponentielle. Un expert philippin en communication de l'université de Manille a déclaré dans Junge Freiheit : "TikTok est devenu la source d'information la plus importante pour la jeune génération".

En citant cela, il faut certainement garder à l'esprit - en tant qu'observateur européen - que la tendance démographique aux Philippines est "légèrement différente" de celle de l'Europe occidentale: "Dans notre pays, 70 % de la population a moins de 30 ans. L'âge moyen aux Philippines est de 25 ans". TikTok a été et est toujours extrêmement important, même dans la politique, aux Philippines. Lors des élections, le candidat de TikTok était Marcos junior (en fait, le fils de...), qui était également le candidat préféré de la Chine. La candidate adverse, Leni Robredo, souhaitait une ligne de conduite plus indépendante vis-à-vis de la Chine, mais elle a dû donner s'avouer vaincus. Marcos junior a été élu et tout le monde s'attendait à ce qu'il poursuive sa politique favorable à la Chine.

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La pression de la Chine sur Taïwan est trop forte - un pétrolier philippin inverse son cours de navigation

L'élection de Marcos junior était donc tout à fait conforme aux souhaits de la Chine. Seulement, la position plus agressive de la Chine à l'égard de Taïwan a discrètement fait basculer le gouvernement philippin. Marcos est originaire du nord des Philippines, sa province natale d'Ilocos Norte est à peine à 30 minutes de vol de la côte sud de Taïwan", explique le spécialiste de la communication. L'action de la Chine a suscité une grande inquiétude chez l'homme politique".

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En outre, "Bongbong" (surnom donné à Marcos Jr. dans l'archipel) a entamé des discussions avec le Japon et les États-Unis sur une prochaine coopération militaire. Un accord concret a déjà été conclu avec le Japon pour qu'il puisse stationner des troupes sur l'archipel. Et Marcos a accordé aux États-Unis quatre nouveaux points d'appui militaires, ce qui constitue un net revirement par rapport à la politique étrangère et à la géopolitique de l'ancien dirigeant philippin Duterte.
 
Peter Logghe
 

mercredi, 26 avril 2023

L'expansion de l'OTAN contre le choc pétrolier de l'OPEP

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L'expansion de l'OTAN contre le choc pétrolier de l'OPEP

par Luciano Lago

Source: https://www.ideeazione.com/espansione-della-nato-contro-lo-shock-petrolifero-opec/

L'inclusion de la Finlande et l'expansion conséquente de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) auraient apporté beaucoup de joie au monde occidental qui combat soi-disant la Russie pour la protection de la démocratie et des droits de l'homme (sic !). Le véritable objectif de cette lutte, comme nous le savons déjà, est tout autre et consiste à préserver l'ordre mondial dominé par l'Occident, principalement dirigé par Washington, après la Seconde Guerre mondiale, qui a pris la forme d'une hégémonie unilatérale des États-Unis après la chute de l'Union soviétique au début des années 1990.

La Russie - et la Chine - constituant jusqu'à présent la résistance la plus évidente à cette hégémonie unilatérale des États-Unis, ces derniers font tout ce qu'ils peuvent pour gagner de plus en plus d'alliés afin de renforcer leur position face à une menace réellement redoutable.

L'expansion de l'OTAN est l'une des nombreuses mesures que l'Occident - encore une fois, principalement les États-Unis - a récemment prises pour préserver l'ordre mondial. Cependant, le conflit militaire en cours entre la Russie et l'Ukraine (OTAN) a changé le monde de plusieurs façons significatives. Tout d'abord, malgré l'expansion de l'OTAN, les États-Unis ne peuvent même pas espérer "isoler" la Russie au niveau mondial. Quant à la Chine, les États-Unis ne peuvent pas s'en "séparer" sans que cela leur coûte cher, et ils ne le feront pas non plus sans conséquences géopolitiques majeures.

Plus que toute autre chose, la récente décision des pays de l'OPEP+ de réduire leurs niveaux de production - et par conséquent d'augmenter les prix du pétrole - montre que les producteurs de pétrole les plus puissants du monde continuent de se ranger du côté de la Russie. Cette décision unanime n'est pas seulement une question économique. En effet, la capacité des pays de l'OPEP à résister aux pressions américaines et à suivre une approche autonome - et à soutenir la Russie - montre que ces pays suivent en réalité la vision russe et chinoise d'un monde multipolaire dans lequel les pays - ou blocs - peuvent agir en fonction de leurs propres intérêts nationaux et sans les compromettre pour satisfaire l'obsession de domination des États-Unis. Pour l'hégémonie américaine, cette dérive irrésistible vers le multipolarisme est bien plus dommageable pour son avenir que les effets négatifs de l'expansion de l'OTAN.

Alors que la décision de réduire la production de pétrole nuira aux États-Unis et à leurs alliés en Europe, qui sont déjà confrontés à une crise économique et à une crise du coût de la vie, les délibérations du groupe de l'OPEP montrent également une grande indifférence à la façon dont elles nuiront directement à l'administration Biden, à la fois sur le plan géopolitique et sur le plan intérieur.

Considérez ceci : depuis le début du conflit entre la Russie et l'Ukraine (OTAN), les États-Unis ont vendu du pétrole cher à l'Europe. En mars, les ventes de pétrole des États-Unis à l'Europe ont atteint un niveau record. Mais cette augmentation de l'offre a également entraîné une hausse des prix d'environ 50 %. Maintenant que l'OPEP a décidé de réduire sa production et d'augmenter les prix du pétrole, les alliés européens de Washington - et même les consommateurs américains - achèteront du pétrole et du gaz encore plus chers, ce qui pourrait aggraver la crise du coût de la vie que les classes moyennes et laborieuses des pays européens endurent et paient déjà.

Sur le plan intérieur, la décision de l'administration Biden de forcer l'Europe à réduire les ventes de pétrole russe et/ou à fixer un plafond et de déclencher ainsi une guerre économique contre la Russie deviendra donc encore plus délicate.

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Sur le plan politique, la politique de l'administration Biden consistant à libérer régulièrement du pétrole de la réserve stratégique américaine pour tenter de micro-gérer les prix du pétrole et de les maintenir à un niveau anormalement bas dans l'intérêt des consommateurs américains deviendra encore plus difficile à mettre en œuvre dans les semaines à venir.

Pour l'administration Biden - qui jubile vu l'expansion de l'OTAN - la diminution de sa capacité à micro-gérer en permanence les prix du pétrole coïncide avec le début de ce que beaucoup considèrent comme la campagne présidentielle agressive de Donald Trump.

Il y a donc deux chocs. Le fait que la Russie ait l'OPEP de son côté signifie que les États-Unis et l'OTAN n'ont jusqu'à présent pas réussi à vaincre la Russie de manière significative. Joe Biden ne peut pas se prévaloir d'une victoire sur la Russie pour sa réélection l'année prochaine.

D'autre part, l'incapacité de Washington à influencer l'OPEP signifie un échec radical de la politique étrangère, ce qui laisse présager un succès russe. En termes géopolitiques, la décision de l'OPEP+ est intervenue après une réunion entre le vice-premier ministre russe Alexander Novak et le ministre saoudien de l'énergie, le prince Abdulaziz bin Salman, qui s'est tenue à Riyad le 16 mars et qui portait sur la coopération sur le marché du pétrole. Cette rencontre est donc largement considérée comme la consolidation du lien entre la Russie et l'Arabie saoudite.

L'incapacité à gérer la crise du coût de la vie et le fait que l'administration Biden a perdu des alliés importants, tels que l'Arabie saoudite, le Brésil et d'autres, se combinent pour devenir des points de friction cruciaux pour un Donald Trump sûr de lui, qui présente déjà les obstacles à son retour en termes de "conspiration" de l'administration Biden visant à le faire condamner et finalement arrêter.

En Europe, ce choc pétrolier va encore compliquer la politique intérieure et extérieure. Les récentes manifestations à grande échelle en France contre la réforme des retraites ou les grèves généralisées en Grande-Bretagne pour l'augmentation des salaires deviendront une scène récurrente. La reproduction de ces manifestations en Europe pourrait contraindre de nombreux pays européens à reconsidérer l'ampleur de leur soutien à la guerre des États-Unis contre la Russie (et la Chine).

Le choc pétrolier provoqué par la Russie et l'Arabie saoudite l'emporte donc sur le choc que les États-Unis prévoyaient d'infliger à la Russie par le biais de l'expansion de l'OTAN - qui n'aura probablement aucun effet sur le terrain en Ukraine et que la Russie a d'autres moyens de contrer.

Idee & Azione

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mardi, 25 avril 2023

Les projets de double connectivité de l'Inde en Eurasie pourraient accélérer la dédollarisation

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Les projets de double connectivité de l'Inde en Eurasie pourraient accélérer la dédollarisation

par Andrew Korybko

Source: https://www.ideeazione.com/i-progetti-di-doppia-connettivita-dellindia-in-eurasia-possono-accelerare-la-de-dollarizzazione/

La semaine dernière, plusieurs événements d'une grande importance pour la connectivité eurasienne ont échappé à la plupart des observateurs. Une délégation russe conduite par le vice-premier ministre Denis Manturov a conclu sa visite à Delhi, au cours de laquelle elle a exploré les possibilités de quintupler les exportations de l'Inde, un objectif précédemment déclaré par cette dernière. Cette visite a été suivie d'un protocole d'accord sur le transit et la coopération commerciale conclu à Moscou entre la Russie et l'Iran.

À la fin de la semaine, les compagnies ferroviaires de Russie, du Kazakhstan et du Turkménistan se sont mises d'accord sur leur propre mémorandum "pour mettre en place des tarifs compétitifs et un transport "sans rupture" des marchandises de [leurs pays] vers l'Iran, l'Inde et les pays du Moyen-Orient et de la région Asie-Pacifique". Le PDG du Fonds iranien de développement des transports a ensuite annoncé la possibilité d'investissements russes et indiens dans les infrastructures du pays.

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Enfin, dimanche, le ministre indien des ports, de la navigation et des voies navigables, Sarbananda Sonowal, a inauguré à Chennai une série de projets qui, selon lui, renforceront le corridor maritime Vladivostok-Chennai (VCMC) avec la Russie. Ce développement s'ajoute aux précédents de la semaine dernière concernant les progrès sur le corridor de transport nord-sud (NSTC) entre la Russie, l'Iran, l'Asie centrale et, au moins officiellement, l'Azerbaïdjan également (à condition que les tensions régionales n'empêchent pas Bakou de jouer un rôle à l'avenir).

Ensemble, le NSTC et le VCMC représentent les deux projets de connectivité eurasienne non chinois les plus importants, qui visent à promouvoir l'intégration Sud-Sud afin d'éviter à titre préventif le scénario d'une dépendance potentiellement disproportionnée à l'égard de la République populaire. Toutes les parties entretiennent des liens commerciaux étroits avec Pékin, mais aucune d'entre elles ne souhaite que son rôle croissant dans les affaires économiques mondiales remplace celui, en déclin, de Washington. Ils souhaitent plutôt qu'il leur ouvre de nouvelles perspectives.

Les projets de double connectivité de l'Inde, qui intégreront le cœur de l'Eurasie par le biais du NSTC et feront de même avec le Rimland eurasien par le biais du VCMC (en gardant à l'esprit que le transit se fera par le biais de la puissance commerciale de l'ANASE), offrent une occasion unique d'accélérer les processus de multipolarité financière. Favoriser l'utilisation des monnaies nationales dans les échanges commerciaux par ces voies, au lieu de monnaies tierces telles que le dollar ou le yuan, peut jeter les bases d'une croissance exponentielle du commerce bilatéral au fil du temps.

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L'Inde est actuellement la cinquième économie mondiale et est en passe de devenir la troisième d'ici la fin de la décennie, ce qui cadre parfaitement avec son rôle attendu de leader informel du Sud dans la trifurcation des relations internationales qui s'annonce. Sur le plan financier, l'internationalisation attendue de la roupie peut être facilitée en encourageant ses partenaires du NSTC-VCMC à utiliser le nouveau modèle de dédollarisation qu'il a lancé avec le Bangladesh la semaine dernière.

Comme le résume l'analyse hyperliée ci-dessus, "toutes les exportations du partenaire le plus petit dans un duo d'Etats donné seront dédollarisées, tandis que le partenaire le plus grand les compensera par ses propres exportations". Cette politique pragmatique garantit qu'il y a suffisamment de monnaie nationale en circulation pour répondre à leurs besoins minimaux en matière de commerce bilatéral, tout en maintenant une quantité confortable de dollars en circulation pour faciliter leurs échanges avec d'autres pays qui se sentent encore à l'aise avec le billet vert".

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L'accélération susmentionnée des processus de multipolarité financière serait multipliée si ce modèle était utilisé par les partenaires du NSTC-VCMC de l'Inde au sein de l'ANASE, de l'Azerbaïdjan, des républiques d'Asie centrale (RCA), de l'Iran et de la Russie, sans parler de l'adhésion de la République de Corée (ROK) et du Japon. Ces deux pays peuvent rester réticents à commercer avec la Russie en raison des pressions exercées par leur protecteur américain, mais ils peuvent toujours dédollariser leur commerce avec l'Inde en exploitant la vision VCMC de cette dernière.

En ce qui concerne l'avenir, il y a de nombreuses raisons d'être optimiste quant à la dédollarisation du commerce en Asie, grâce au rôle intégral que l'Inde est prête à jouer à cet égard par l'intermédiaire du NSTC-VCMC. Bien sûr, il faudra beaucoup de temps avant que des progrès tangibles ne soient réalisés, mais les bases de ces progrès sont là pour tous, grâce aux développements de la semaine dernière. Les observateurs seraient donc bien inspirés de suivre cette tendance, qui fait partie des plus importantes tendances financières qui se développent aujourd'hui, même si c'est de manière graduelle.

Publié en partenariat sur One World - Korybko Substack

 

L'Inde introduit un modèle unique de dédollarisation

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L'Inde introduit un modèle unique de dédollarisation

par Andrew Korybko

Source: https://www.ideeazione.com/lindia-sta-introducendo-un-modello-unico-di-de-dollarizzazione/

L'Inde et le Bangladesh ont convenu de dédollariser partiellement leurs échanges commerciaux selon un modèle unique qui pourrait devenir la norme mondiale dans un avenir proche. La totalité des 2 milliards de dollars d'exportations du Bangladesh vers l'Inde sera dédollarisée, tandis que l'Inde fera de même en dédollarisant un niveau équivalent de ses exportations vers le Bangladesh, d'une valeur d'environ 13,69 milliards de dollars. En d'autres termes, toutes les exportations du plus petit partenaire dans un duo d'Etats donné seront dédollarisées, tandis que le plus grand partenaire fera de même avec ses propres exportations.

Cette politique pragmatique garantit la circulation d'une quantité suffisante de monnaie nationale pour répondre aux besoins minimaux du commerce bilatéral, tout en conservant une quantité de dollars en circulation pour faciliter les échanges avec d'autres pays qui se sentent encore à l'aise avec le billet vert. C'est tellement simple que n'importe quel pays pourrait facilement imiter le modèle de ces deux pays, s'il en avait la volonté politique, ce qui est le cas d'un nombre croissant d'entre eux, après que les États-Unis ont utilisé le dollar comme arme contre la Russie l'année dernière.

À l'insu de la plupart des observateurs qui se concentrent exclusivement sur le rôle du yuan dans les processus de dédollarisation, la politique de commerce extérieur récemment dévoilée par l'Inde vise officiellement à internationaliser la roupie, une monnaie très prometteuse pour le rôle du pays en tant que cinquième économie mondiale. Ce n'est pas un hasard si l'Inde a choisi d'introduire son modèle unique de dédollarisation dans la région, car elle espère répandre l'utilisation de la roupie en Asie du Sud avant de le faire dans le reste du Sud mondial.

Cette démarche s'inscrit dans le cadre de la volonté de l'Inde de stimuler le commerce intra-régional, parallèlement à son ascension en tant que grande puissance d'importance mondiale. La Banque mondiale estime que ce chiffre n'est que de 23 milliards de dollars, soit un maigre 5 % comparé aux 25 % de l'ANASE. Si l'on se réfère aux statistiques citées précédemment, selon lesquelles le niveau du commerce bilatéral entre l'Inde et le Bangladesh est légèrement inférieur à 16 milliards de dollars au total (bien que d'autres sources affirment qu'il est supérieur à 18 milliards de dollars), cela signifie qu'au moins deux tiers du commerce intrarégional de l'Asie du Sud n'impliquent que ces deux pays.

Il est donc tout à fait logique que l'Inde dévoile d'abord son modèle unique de dédollarisation avec le Bangladesh, afin de le perfectionner avant d'étendre cette approche à l'ensemble de l'Asie du Sud et au-delà. D'autres pays feraient bien d'envisager de suivre l'exemple de l'Inde en dédollarisant partiellement leurs échanges avec leur partenaire régional le plus proche. Ce modèle pragmatique mérite d'être employé par le plus grand nombre de pays possible, car c'est lui qui a le plus de chances d'accélérer la multipolarité financière.

Publié en partenariat avec One World - Korybko Substack

lundi, 10 avril 2023

Li Haidong: Méfiez-vous de la création d'une crise majeure en Asie-Pacifique par les Etats-Unis

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Li Haidong: Méfiez-vous de la création d'une crise majeure en Asie-Pacifique par les Etats-Unis

Source : Global Times & https://opinion.huanqiu.com/article/42kYYm0ouZy

par Li Haidong

Premier dirigeant étranger à se rendre aux États-Unis pendant le mandat de M. Biden, le Premier ministre japonais Yoshihide Suga travaille désormais avec M. Biden sur un certain nombre de questions, notamment la concurrence stratégique avec la Chine. Parallèlement, l'administration Biden a envoyé d'anciens fonctionnaires de haut niveau à Taïwan et a récemment dépêché à plusieurs reprises des navires de guerre américains en mer de Chine méridionale. Elle a également encouragé ses alliés européens à déplacer leurs opérations militaires dans la région Asie-Pacifique et à y mener sans relâche des exercices militaires conjoints. Tous ces signes montrent que les États-Unis ne veulent pas d'une situation durable et stable dans la région Asie-Pacifique. Au contraire, créer ou provoquer des crises pour maintenir la région dans un état de tension, de crise ou même de conflit modéré est conforme au besoin des États-Unis de promouvoir la "stratégie indo-pacifique".

Les États-Unis ont une tradition de politique de "changement plutôt que de stabilité"

Tout d'abord, les États-Unis se sont développés en créant des crises ou des guerres et en y répondant, ce qui a façonné leur caractère national et leurs traditions diplomatiques. Qu'il s'agisse de l'expansion territoriale et du massacre des Indiens en Amérique du Nord au 19ème siècle, ou de l'établissement et du maintien de l'hégémonie à l'échelle mondiale au 20ème siècle avec la "guerre chaude" et la "guerre froide", l'obsession des États-Unis pour les crises ou les guerres reflète une tradition politique de "recherche du changement plutôt que de stabilité". Elle est non seulement devenue un élément intrinsèque du comportement des États-Unis à l'étranger, mais aussi une condition préalable essentielle pour que les États-Unis, en tant que nation d'immigrants, puissent résoudre la crise de l'identité nationale et ethnique dans leur pays et assurer leur intégrité et leur stabilité politiques à différentes époques.

Au cours de la première décennie qui a suivi la fin de la guerre froide, les États-Unis n'ont pas profité de leur situation "unipolaire" pour promouvoir l'évolution pacifique de l'ordre international et établir des relations stratégiques et stables entre les grandes puissances ; au contraire, ils ont continué à exacerber les conflits et les guerres dans les Balkans et à promouvoir l'expansion de l'OTAN à l'est. Au 21ème siècle, les États-Unis ont initié ou mené une série de guerres, notamment en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie, qui ont entraîné la crise financière mondiale de 2008, la guerre civile en Ukraine de 2014 à aujourd'hui et de nombreuses "révolutions de couleur" dans des régions clés du monde. Dans la nouvelle épidémie qui ravage le monde depuis le début de l'année dernière, les efforts des États-Unis pour se débarrasser de l'épidémie et la résistance politique à celle-ci ont conduit à la poursuite de la propagation de la crise épidémique mondiale. Face à la nécessité urgente d'une coopération mondiale dans la lutte contre l'épidémie, les États-Unis se sont engagés dans une stratégie dite de coalition pour diviser la réponse internationale à l'épidémie et l'utiliser pour alimenter la concurrence géopolitique avec la Chine, la Russie et d'autres pays.

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Depuis une trentaine d'années, les États-Unis sont devenus un véritable semeur de chaos mondial, et les régions dans lesquelles ils ont été impliqués se sont non seulement souvent retrouvées dans un chaos et une crise, mais les grandes divisions internes des États-Unis s'aggravent également et sont difficiles à guérir. L'élite politique américaine est exceptionnellement anxieuse et désespérée à l'idée d'une crise plus importante. Les États-Unis, qui ne sont pas un pays réfléchi, tentent actuellement de provoquer des conflits ou des crises plus graves dans la région Asie-Pacifique, en opérant à un niveau plus profond un processus de transformation externe des contradictions internes.

Au service d'une revitalisation durable du système d'alliances en Asie-Pacifique

Deuxièmement, pour revitaliser durablement le système d'alliances que l'élite politique américaine actuelle a identifié comme la ressource stratégique la plus précieuse, les États-Unis ont objectivement et urgemment besoin d'une crise majeure dans la région Asie-Pacifique ou en Europe. L'expérience et les modèles historiques prouvent qu'en l'absence de divisions et de confrontations entre groupes d'États, les alliances déclinent, voire s'effondrent. Après l'effondrement de l'Union soviétique, on pensait généralement que le système d'alliances forgé par les États-Unis pendant la guerre froide disparaîtrait progressivement de la scène historique, mais au contraire, il n'a cessé de se renforcer. La raison fondamentale de ce phénomène est que les États-Unis ont créé de nouveaux rivaux ou ennemis en exploitant ou même en créant des confrontations ou des conflits de grande envergure, tels que la crise des Balkans, la guerre élargie contre le terrorisme et la rivalité stratégique entre les grandes puissances, afin d'assurer la pérennité et la consolidation de leurs propres alliances bilatérales et dirigées par l'OTAN dans la région de l'Asie-Pacifique.

Dans les années 1990, les États-Unis se sont obstinés à lancer le processus d'expansion de l'OTAN à l'est, après la guerre froide, créant ainsi une nouvelle fois une division durable en Europe, et la Russie n'a eu d'autre choix que d'affronter les États-Unis en Europe. La guerre civile en Ukraine, qui dure depuis 2014, est à la fois une manœuvre des États-Unis pour créer des crises internes dans d'autres pays afin d'élever la réalité de la fonction de l'OTAN, et le résultat inévitable de l'intensification de la contradiction structurelle entre les États-Unis et le refus de la Russie de revenir à une architecture de sécurité européenne dominante. Cette crise majeure a porté un coup à la Russie et renforcé la position dominante de l'OTAN en matière de sécurité en Europe, de sorte que la guerre civile en Ukraine ne s'apaisera pas, mais ne fera que s'intensifier.

La logique qui sous-tend l'héritage et la promotion de la stratégie indo-pacifique par l'administration Biden est la même que celle des États-Unis en Europe, où elle a été utilisée pour renforcer les alliances en créant des crises. Afin de raviver la fonction d'alliance des États-Unis dans la région Asie-Pacifique, l'administration Biden promeut vigoureusement l'opinion à l'échelle internationale selon laquelle "la Chine, la Russie et d'autres pays constituent une menace" et attise constamment les conflits régionaux. Les États-Unis se sont ingérés à plusieurs reprises dans nos affaires intérieures au nom de la démocratie et des droits de l'homme sur des questions liées aux frontières, à Hong Kong, à Taïwan et au Tibet, et ont créé des conflits sur des questions telles que la mer de Chine méridionale, la mer de Chine orientale et la gestion des épidémies, tout en menant fréquemment des exercices militaires conjoints avec leurs alliés. Pour les États-Unis, la stabilité de la région Asie-Pacifique n'est pas conforme à leurs soi-disant intérêts stratégiques tels qu'ils sont définis. Créer des divisions et des crises profondes dans la région Asie-Pacifique et s'engager dans une rivalité ou une confrontation stratégique entre les grandes puissances pour renforcer la fonction de l'alliance américaine dans la région Asie-Pacifique est l'essence même de la stratégie indo-pacifique des États-Unis.

Promouvoir le double processus de "l'OTANisation de l'Asie-Pacifique" et de "l'OTAN Asie-Pacifique"

Troisièmement, le double processus de l'OTANisation et de l'OTAN Asie-Pacifique constitue les deux piliers les plus importants de la stratégie américaine pour l'Indo-Pacifique et l'indicateur clé de sa réussite. Il s'agit également d'un indicateur clé de sa réussite. Contrairement à l'OTAN, qui est fermement ancrée dans la domination du paysage sécuritaire européen, les États-Unis disposent d'un certain nombre d'alliances bilatérales dans la région Asie-Pacifique qui ne sont ni fonctionnelles ni suffisamment importantes pour garantir leur domination du paysage sécuritaire de l'Asie-Pacifique. Ils accélèrent le fonctionnement du dialogue quadripartite sur la sécurité en provoquant davantage de crises et en cherchant à l'utiliser comme base pour relier les nombreuses alliances bilatérales qui existent déjà dans la région Asie-Pacifique, avec les États-Unis au centre, et finalement former une alliance multilatérale dirigée par les États-Unis pour l'"OTANisation de l'Asie-Pacifique". Cette alliance façonnera également, par ricochet, le paysage sécuritaire de l'Europe. L'application de cette logique de façonnage du paysage sécuritaire européen à la région Asie-Pacifique est si claire que le rythme et l'orientation de la politique américaine sont hautement prévisibles.

Les États-Unis sont déterminés à pousser leurs alliés européens au sein de l'OTAN à se détacher de la soi-disant perspective européenne, jugée étroite, pour pouvoir jouer un rôle en dehors de l'Europe dès que possible. Cet objectif est poursuivi au milieu de nombreuses crises majeures. À l'heure où l'accent est mis sur une compétition stratégique majeure avec la Chine et la Russie, les États-Unis doivent de toute urgence accélérer l'"Asie-Pacifique" des institutions et des fonctions de l'OTAN. Le fait de provoquer ou de créer des crises majeures est le moyen le plus crucial d'atteindre cet objectif. La récente décision de l'administration Biden et de l'OTAN d'annoncer un retrait complet de l'Afghanistan dès que possible n'est pas une contraction de l'OTAN en Asie, mais un plan visant à déplacer le centre des opérations vers la région de l'Asie de l'Est. Ils ne se préoccupent pas de la manière dont le chaos en Afghanistan sera finalement résolu, mais tentent de créer une crise plus importante dans la région de l'Asie de l'Est afin d'accélérer le processus de "l'Asie-Pacification de l'OTAN".

L'utilisation ou la création de crises majeures est une caractéristique habituelle du comportement des États-Unis dans la promotion de leurs intérêts stratégiques, et les pays de l'Asie-Pacifique qui attachent de l'importance à leur propre prospérité et à leur propre stabilité devraient en être bien conscients et rester vigilants.

(L'auteur est professeur à l'Institut des relations internationales de l'Institut du service extérieur).

mardi, 04 avril 2023

Vers où se déplace l'axe du monde?

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Vers où se déplace l'axe du monde?

par Sembe

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/03/18/bs-dove-si-sta-spostando-lasse-del-mondo/

L'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran conduisant à la réouverture de leurs ambassades respectives dans les deux pays date de quelques semaines. Les deux plus grandes puissances musulmanes du Moyen-Orient, l'une référence du courant chiite, l'autre du courant sunnite, l'une alliée de l'Occident, l'autre alliée des puissances " multipolaires ".

Après huit ans de guerre froide, qui s'est d'ailleurs déroulée sur plusieurs fronts régionaux comme le Liban et le Yémen, cet accord est une véritable surprise. Mais la véritable surprise réside dans le lieu où il a été conclu: à Pékin.

Oui, le vieux maître américain qui, ces dernières années, a mis fin à 20 ans de domination militaire au Moyen-Orient, laisse la région "ouverte" aux tentacules d'autres superpuissances, en l'occurrence la Chine, qui révèle toute sa nouvelle importance dans le scénario international.

Avec son arme acérée qu'est la diplomatie, la Chine avance là où l'Occident a échoué, comme en Afrique où les Européens reculent, les États africains préférant faire des affaires avec les Chinois puisqu'ils n'ont pas, à leur avantage, la prétention morale moderne de l'Occident.

Il faut ajouter que l'Arabie Saoudite, allié historique de l'Amérique depuis les années 1990 avec l'invasion du Koweït, a récemment manifesté son intérêt pour rejoindre les BRICS (pacte économique des pays en voie de développement). 

En résumé, il ne faut pas se laisser séduire par "l'avancée" des puissances non-européennes en pensant qu'elles vont nous libérer du carcan de Washington.

Voir en la Chine un nouveau pôle auquel se raccrocher reviendrait à passer d'un maître hypercapitaliste à un autre maître hypercapitaliste, où, pour l'amour du ciel, il n'y aurait peut-être pas de propagande Lgbt. La civilisation européenne ne peut et ne doit pas finir entre les mains de l'Asie.

Aujourd'hui comme en 1945, notre continent continue d'être aux prises avec ses ennemis sur tous les fronts, il nous appartient de construire son avenir de manière à faire enfin de l'Europe un acteur géopolitique majeur sans avoir à la reléguer au rang de partenaire de soutien de la Russie, des États-Unis, de la Chine ou de toute autre puissance aléatoire à votre guise.

Géopolitique des infrastructures 

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Géopolitique des infrastructures 

Source: https://katehon.com/ru/article/infrastrukturnaya-geopolitika

Plusieurs pays tentent d'utiliser les projets d'infrastructure pour exercer leur influence géopolitique. Les initiatives récentes les plus importantes sont celles de la Chine, des États-Unis et de l'Union européenne.

Projet américain Build Back Better

Le plan Build Back Better est un cadre législatif proposé par le président américain Joe Biden entre 2020 et 2021. Il est considéré comme un projet ambitieux par sa taille et sa portée. Il vise à réaliser le plus grand investissement public à l'échelle nationale dans des projets sociaux et d'infrastructure, ainsi qu'à s'appuyer sur des programmes environnementaux qui existent depuis la Grande Dépression.

Si une grande partie du public sait que Build Back Better a les objectifs les plus vastes, tels que la décarbonisation nationale et la réduction des coûts des médicaments, les analystes estiment que le plan constitue également une étape importante dans le développement de l'infrastructure américaine. M. Ricketts, chercheur au Center for American Progress, a expliqué à CNBC que le plan Build Back Better s'appuie sur un projet de loi bipartisan sur les infrastructures d'un montant de 1000 milliards de dollars, que M. Biden a promulgué en novembre 2021.

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Ce projet de loi bipartisan compense le manque d'investissements durables dans les infrastructures traditionnelles des États-Unis: autoroutes, routes et ponts, lignes électriques, infrastructures hydrauliques. Les responsables affirment que "Build Back Better" est un projet de loi sur les infrastructures non seulement pour le 21ème siècle, mais aussi pour l'avenir.

"Nous avons besoin d'un réseau électrique stable et fiable. Mais nous avons également besoin d'un réseau électrique stable, sûr et propre pour éviter les pires effets du changement climatique et construire une véritable économie de l'énergie propre au 21ème siècle, et non l'économie polluante des combustibles fossiles du siècle dernier", a déclaré M. Ricketts.

Les fabricants américains doivent poser des centaines de kilomètres de nouvelles lignes électriques et les producteurs d'énergie doivent repenser leurs modèles économiques pour se concentrer sur les batteries et le lithium. Les sociétés d'ingénierie doivent également tenir compte de l'élévation du niveau de la mer et de l'érosion lorsqu'elles décident de l'endroit où construire des infrastructures de transport plus efficaces.

Pour Wall Street, tout cela signifie plus de revenus, d'emplois et de profits pour les entreprises qui construisent les infrastructures.

Bien que le projet de loi soit susceptible d'être modifié, l'une des principales dispositions de l'actuel projet "Build Back Better" est un ensemble de crédits d'impôt et de réductions d'environ 300 milliards de dollars en faveur de l'énergie propre, des voitures électriques, des bâtiments propres et de la décarbonisation.

Selon la Maison Blanche, une telle structure permettrait, par exemple, de réduire d'environ 30 % le coût de l'installation de panneaux solaires sur le toit d'une maison et de réduire de 12.500 dollars le coût d'une voiture électrique fabriquée aux États-Unis, avec des matériaux américains et une main-d'œuvre syndiquée.

Malgré la surenchère qui règne au Capitole, les investisseurs ne s'inquiètent pas des perspectives du projet de loi et de son potentiel pour les fabricants et les entreprises de construction américains. Les économistes américains divergent dans leurs prévisions du prix final de Build Back Better.

"Le Sénat a toujours été le plus grand obstacle à la législation BBB, et nous nous attendons à ce que la législation soit modifiée avant de passer à la Chambre", a écrit Jan Hatzius, économiste en chef chez Goldman Sachs.

Feroli, de JP Morgan, s'attend à ce que le Build Back Better soit de l'ordre de 1000 à 1500 milliards de dollars. Il a également déclaré que l'impact des événements récents serait plus étendu que les mesures d'urgence prises pour lutter contre le Covid-19 (en référence à la loi CARES et au plan de sauvetage américain).

Mais tout n'est pas rose. Les analystes estiment que les consommateurs sont plus susceptibles de tolérer l'impact de la prolongation du crédit d'impôt pour enfants de l'année prochaine que de rendre les routes plus fluides ou d'augmenter le nombre de stations de recharge pour les voitures électriques. Il pourrait s'écouler des années avant que la plupart des Américains ordinaires ne conduisent des voitures électriques.

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Une ceinture, une route

La première route de la soie a vu le jour lors de l'expansion vers l'ouest de la dynastie chinoise Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.), qui a établi des réseaux commerciaux à travers l'Asie centrale actuelle (Afghanistan, Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan), ainsi qu'à travers l'Inde et le Pakistan actuels au sud. Ces routes s'étendaient sur plus de quatre mille kilomètres jusqu'en Europe.

Le président Xi a annoncé cette initiative lors de ses visites officielles au Kazakhstan et en Indonésie en 2013. Le plan se compose de deux parties: la ceinture économique terrestre de la route de la soie et la route de la soie maritime. Les deux projets ont d'abord été désignés sous le nom d'initiative "Une ceinture, une route", avant de devenir l'initiative "La ceinture et la route".

La vision de M. Xi prévoyait un vaste réseau de chemins de fer, de pipelines énergétiques, d'autoroutes et de passages frontaliers ordonnés, à la fois vers l'ouest - à travers les anciennes républiques soviétiques montagneuses - et vers le sud, en direction du Pakistan, de l'Inde et du reste de l'Asie du Sud-Est. Selon M. Xi, un tel réseau permettrait d'étendre l'utilisation internationale de la monnaie chinoise, le yuan, et de "supprimer le goulet d'étranglement de la connectivité asiatique".

Les motivations de la Chine pour cette initiative sont à la fois géopolitiques et économiques. Xi a promu l'idée d'une Chine plus affirmée, à un moment où le ralentissement de la croissance et les relations commerciales difficiles avec les États-Unis ont contraint les dirigeants du pays à ouvrir de nouveaux marchés pour leurs produits.

Dans le même temps, la Chine souhaite renforcer les liens économiques mondiaux avec ses régions occidentales, qui ont été historiquement négligées. La promotion du développement économique dans la province occidentale du Xinjiang, où un mouvement séparatiste est en plein essor, est une priorité absolue, tout comme la sécurisation des approvisionnements énergétiques à long terme en provenance d'Asie centrale et du Moyen-Orient, en particulier via des routes que l'armée américaine ne peut pas bloquer.

L'initiative "Une ceinture, une route" a également suscité de l'opposition. Pour certains pays qui s'endettent lourdement pour financer la modernisation de leurs infrastructures, l'argent investi dans le projet est perçu comme un potentiel cadeau empoisonné. Selon certains experts, le recours à des prêts à faible taux d'intérêt plutôt qu'à des subventions est une opération trop risquée. Certains investissements dans le projet ont fait l'objet d'appels d'offres non transparents et ont nécessité la participation d'entreprises chinoises. En conséquence, les entrepreneurs ont gonflé les coûts, ce qui a conduit à l'annulation de projets et à des réactions politiques négatives.

Les États-Unis partagent les inquiétudes de certains pays quant aux intentions de la Chine. Le développement des économies de l'Asie du Sud et de l'Asie centrale est un objectif de longue date des États-Unis, qui s'est intensifié depuis le début de la guerre menée par les États-Unis en Afghanistan et le pivot vers l'Asie du président Barack Obama.

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L'Inde a tenté de convaincre les pays que le JCPOA est un plan de domination en Asie, mettant en garde contre ce que certains analystes ont appelé la stratégie géoéconomique du "collier de perles", selon laquelle la Chine crée un fardeau de dettes insoutenable pour ses voisins de l'océan Indien afin de prendre le contrôle de la région. 

Tokyo poursuit une stratégie similaire, en conciliant son intérêt pour le développement des infrastructures régionales et ses soupçons de longue date à l'égard de la Chine.

Plusieurs pays d'Europe centrale et orientale financent l'OSDP, et des États d'Europe occidentale comme l'Italie, le Luxembourg et le Portugal ont même signé des accords de coopération préliminaires sur des projets de l'OSDP. Leurs dirigeants considèrent la coopération comme un moyen d'attirer les investissements chinois et d'améliorer potentiellement la qualité des offres de construction compétitives des entreprises européennes et américaines.

D'autres pays non membres de l'UE sont d'accord avec cette politique. Le président français Emmanuel Macron a appelé à la prudence, déclarant lors d'un voyage en Chine en 2018 que l'OPOP pourrait faire des pays partenaires des "États vassaux".

Moscou est devenu l'un des partenaires les plus enthousiastes de l'OPOP, bien qu'il ait initialement réagi avec prudence à la déclaration de Xi, craignant que les plans de Pékin n'éclipsent la vision de Moscou d'une "Union économique eurasienne" et n'empiètent sur sa sphère d'influence traditionnelle.

Toutefois, les relations de la Russie avec l'Occident s'étant détériorées, le président Vladimir Poutine a décidé, selon les analystes, de lier sa vision eurasienne à l'initiative chinoise.

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L'Europe unie

Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) est un réseau de routes, de voies ferrées, d'aéroports et d'infrastructures hydrauliques dans l'Union européenne. Le RTE-T fait partie d'un réseau transeuropéen (RTE) plus vaste, comprenant le réseau de télécommunications (eTEN) et le projet de réseau énergétique (RTE-E ou Ten-Energy).

Les orientations du RTE-T ont été initialement adoptées le 23 juillet 1996 par la décision n°1692/96/CE du Parlement européen et du Conseil de la Communauté sur les orientations pour le développement d'un réseau transeuropéen de transport. En mai 2001, le Parlement européen et le Conseil ont adopté la décision n°1346/2001/CE modifiant les orientations RTE-T pour les ports maritimes et intérieurs.

En avril 2004, le Parlement européen et le Conseil ont adopté la décision n°884/2004/CE modifiant la décision n°1692/96/CE sur les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen de transport. La révision d'avril 2004 a constitué un changement plus fondamental dans la politique du RTE-T, conçu pour prendre en compte l'élargissement de l'UE et les changements subséquents dans les flux de transport.

En 2017, il a été décidé que les réseaux transeuropéens de transport seraient étendus à l'Europe de l'Est pour inclure les États membres du partenariat oriental. L'extension la plus à l'est du réseau transeuropéen de transport atteindra l'Arménie en février 2019.

Axes prioritaires et projets de développement:

Corridor Baltique-Adriatique (Pologne-République tchèque/Slovaquie-Autriche-Italie) ;

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Corridor nordique-baltique (Finlande-Estonie-Lettonie-Lituanie-Pologne-Allemagne-Pays-Bas/Belgique) ;

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Corridor méditerranéen (Espagne-France-Italie du Nord-Slovaquie-Croatie-Hongrie) ;

Corridor Est/Est-Méditerranéen (Allemagne-République Tchèque-Hongrie-Roumanie-Bulgarie-Grèce-Chypre) ;

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Corridor Scandinavie-Méditerranée (Finlande-Suède-Danemark-Allemagne-Autriche-Italie) ;

Corridor rhénan-alpin (Pays-Bas/Belgique-Allemagne-Suisse-Italie) ;

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Corridor Lisbonne-Strasbourg (Portugal-Espagne-France) ;

Corridor mer du Nord-Méditerranée (Irlande-Royaume-Uni-Pays-Bas-Belgique-Luxembourg-Sud de la France, transformé en Irlande-Belgique-Pays-Bas et Irlande-France en raison du Brexit) ;

Corridor Rhin-Danube (Allemagne-Autriche-Slovaquie-Hongrie-Roumanie, axe de la voie navigable) ;

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Corridor Strasbourg-Danube (Strasbourg-Mannheim-Francfort-Würzburg-Nürnberg-Regensburg-Passau-Wels/ Linz-Vienne-Budapest-Arad-Brasov-Bucharest-Constanta-Sulina).

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Le RTE-T comprend deux niveaux : un réseau global et un réseau central. Le réseau central doit être achevé au plus tard en 2030, et le réseau global en 2050.

Dix corridors ont été identifiés comme étant le réseau central, reflétant les principaux itinéraires interurbains du marché national. Six de ces corridors traversent l'Allemagne. Ils sont multimodaux par nature et sont conçus, entre autres, pour renforcer les liaisons transfrontalières au sein de l'Union.

Le réseau global comprend l'infrastructure ferroviaire, l'infrastructure fluviale, l'infrastructure de transport routier, l'infrastructure maritime et les autoroutes, l'infrastructure de transport aérien ainsi que l'infrastructure de transport multimodal. Le réseau central fait partie du réseau global et contient ses nœuds et connexions les plus importants d'un point de vue stratégique. L'ensemble du réseau de voies navigables fait partie du réseau central.

Conformément au règlement RTE, chaque corridor se voit attribuer un coordinateur de l'UE. Il existe en outre des coordinateurs pour les autoroutes de la mer et le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS). En consultation avec les États membres, les coordinateurs élaborent des plans de travail pour les corridors et contrôlent leur mise en œuvre.

Le nouveau règlement (CE) n°2021/1153 du Connecting Europe Facility (CEF2), adopté le 7 juillet 2021, définit le niveau de financement de certaines mesures/projets. Dans certains États, comme l'Allemagne, le financement peut couvrir jusqu'à 50% des coûts.

Toutefois, les récents développements liés à la crise croissante de l'économie de l'UE ont quelque peu modifié ces plans ambitieux.

mercredi, 29 mars 2023

Le Pakistan refuse de participer au "Sommet pour la démocratie"

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Le Pakistan refuse de participer au "Sommet pour la démocratie"

Source: https://katehon.com/ru/news/pakistan-otkazalsya-ot-uchastiya-v-sammite-za-demokratiyu

Mardi, 28 Mars 2023

Le Pakistan ne participera pas au deuxième "Sommet pour la démocratie" car il n'est pas prêt à prendre "certains engagements nationaux" que ce mode de dialogue international implique. Voilà ce qu'a déclaré mardi le bureau de presse du ministère des Affaires étrangères de la République islamique.

    "Le Pakistan n'a pas participé au sommet, qui a été lancé en 2021 et qui exigeait des pays qu'ils prennent certains engagements nationaux. Le processus du sommet est maintenant à un stade avancé, le Pakistan s'engagera donc avec les États-Unis et les pays coprésidents sur une base bilatérale pour promouvoir et renforcer les principes et les valeurs démocratiques, ainsi que pour promouvoir les droits de l'homme et lutter contre la corruption", a déclaré le ministère pakistanais des Affaires étrangères dans un communiqué.

"Nous sommes reconnaissants aux États-Unis et aux pays coprésidents d'avoir invité le Pakistan à participer au deuxième sommet pour la démocratie qui se tiendra les 29 et 30 mars 2023. Nous apprécions notre amitié avec les États-Unis. Sous l'administration du président Joe Biden, nos relations ont évolué de manière tangible. Nous restons déterminés à renforcer notre coopération pour la paix, la stabilité et la prospérité", a déclaré le bureau.

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Le deuxième sommet pour la démocratie se tiendra sous forme virtuelle et sera coprésidé par la Zambie, le Costa Rica, les Pays-Bas, la République de Corée et les États-Unis les 29 et 30 mars.

Le premier sommet sur la démocratie a été organisé par les États-Unis par vidéoconférence en décembre 2021. Les autorités américaines ont invité 110 États et territoires à y participer. La liste comprend l'île de Taïwan, mais pas la Chine, ainsi que la Russie, la Turquie, l'Égypte et d'autres pays. Le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a noté que l'événement représentait principalement les pays qui suivent la politique de Washington, ainsi que certains de ceux qui, avec leur propre vision de l'ordre international, veulent maintenir de bonnes relations avec les États-Unis.

mardi, 28 mars 2023

Les atlantistes passent à l'attaque. Pour renforcer la Chine et détruire l'Europe. Et rendre Biden heureux

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Les atlantistes passent à l'attaque. Pour renforcer la Chine et détruire l'Europe. Et rendre Biden heureux

Augusto Grandi

Source: https://electomagazine.it/atlantisti-allattacco-per-rafforzare-la-cina-e-distruggere-leuropa-e-far-felice-biden/

L'ennemi public numéro 1 ? Pour les idiots atlantistes, ce ne sont pas les femmes mais, inévitablement, la Chine. Alors que faire pour la contrer ? Vous lui donnez la Russie, le plus grand pays, riche en matières premières indispensables au développement de la Chine et à des prix super réduits. Génial ! Un truc de Yankee, sans doute. Mais il ne suffit pas d'être aussi stupide. Il faut en faire plus pour conserver la première place dans le classement de la stupidité. C'est pourquoi vous donnez aussi à la Chine l'Asie centrale. Puis le monde arabe. Et l'Afrique. Et l'Amérique latine.

Mais, consolation, la République tchèque a tourné le dos à Moscou et à la Chine. Ah bon, c'est bien, c'est parfait. C'est comme quand les clercs de la désinformation italienne jubilaient parce que les sanctions contre la Russie avaient été votées par Saint-Marin et non par Pékin: c'est évidemment du 1 contre 1.

Mais voilà que les analystes, fans du pétomane de Washington, assurent que l'alliance entre Moscou et Pékin ne peut pas durer. Car les Russes n'acceptent pas d'être colonisés. On ne voit pas pourquoi ils accepteraient d'être réduits au rang de serviteurs et de majordomes de Biden. Il est certain que la Russie s'affaiblit et a de moins en moins d'influence sur les anciens pays soviétiques d'Asie centrale, à commencer par le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Ils tentent de jouer un jeu autonome entre l'Ouest et l'Est, mais se retrouveront dépendants de Pékin et de son expansion dans la région.

Car la confrontation imposée par les atlantistes a divisé le monde. Et s'il est vrai que Pékin ne soutient pas militairement la guerre russe en Ukraine pour ne pas rompre totalement ses relations commerciales avec l'Union européenne, il est vrai aussi que les intérêts chinois ne se limitent pas à la vente de quatre T-shirts supplémentaires et d'une sauce tomate de qualité douteuse.

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Le chemin de fer de la route de la soie, associé à la création d'un réseau de liaisons navales, avait des objectifs bien plus ambitieux. Si, pour obéir au maître américain, les Européens devront réduire leurs échanges avec Pékin, il est clair que la Chine aura moins d'intérêt à entretenir de bonnes relations avec une Europe asservie. Et elle sera contrainte de changer de cible, en resserrant toujours plus ses liens avec la Russie.

Dépassant, par la force des choses, toute rivalité avec Moscou. Pékin et Le Caire viennent d'annoncer de nouveaux investissements chinois en Égypte pour un montant de 5 milliards de dollars. Mais cela ne refroidira pas les relations entre l'Égypte et la Russie.

D'un côté, donc, les espoirs absurdes de ceux qui veulent fermer les portes du commerce avec Pékin mais exigent de Xi Jinping qu'il oblige Poutine à se retirer du Donbass, et peut-être même de la Crimée, afin d'envenimer définitivement les relations russo-chinoises. Et de l'autre, les majordomes européens qui ne savent pas comment se rendre indépendants de Washington mais qui, au fond d'eux-mêmes, réalisent qu'une telle situation de dépendance conduira à un désastre complet pour le Vieux Continent. Mais ils vont quand même vers la ruine de leurs propres peuples, pour le plus grand plaisir de rimbamBiden.

 

samedi, 25 mars 2023

La paix chinoise entre Téhéran et Riyad s'étend à Damas. Et l'Égypte bouge aussi...

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La paix chinoise entre Téhéran et Riyad s'étend à Damas. Et l'Égypte bouge aussi...

Enrico Toselli

https://electomagazine.it/la-pace-cinese-tra-teheran-e-riad-si-estende-a-damasco-e-si-muove-anche-legitto/

Alors que Schlein et Meloni s'affrontent pour le titre convoité de majordome le plus fidèle de Biden, le repositionnement géopolitique s'intensifie en Méditerranée. La démarche de Pékin qui a conduit à l'incroyable rapprochement entre l'Iran et l'Arabie Saoudite porte des fruits rapides et de plus en plus étendus. Car l'effet domino concerne aussi la Syrie, où c'est précisément l'Arabie saoudite qui va reprendre son siège diplomatique. Et le geste de Riyad ouvrira la voie à la réintégration de Damas dans le contexte du monde arabe dont la Syrie avait été exclue.

Mais l'Egypte bouge aussi, qui, après l'accord avec la Russie sur la dédollarisation des échanges, est en train de conclure des accords similaires avec la Chine et l'Inde. Des signaux évidemment ignorés par les clercs de la désinformation italienne (ndt: et européenne). Et le système bancaire américain connaît simultanément des difficultés qui se répercutent aussi en Suisse. Ce n'est pas vraiment la meilleure façon de convaincre le monde d'accepter la domination de Washington et de Wall Street.

Entre-temps, Téhéran et Bagdad, pour fêter dignement le 20ème anniversaire de l'invasion anglo-américaine, conviennent de renforcer leur collaboration dans une fonction anti-kurde. En théorie, c'est contre le terrorisme kurde, en pratique c'est contre l'utilisation des Kurdes par les Etats-Unis. Les Turcs, qui sont appelés à voter en mai, sont également tout à fait d'accord sur ce point.

Justement, les élections en Turquie font apparaître les situations paradoxales. Erdogan, qui est particulièrement détesté par l'administration américaine pour ses nombreux volte-face et pour ne pas avoir adhéré aux sanctions contre Moscou, a ralenti ces dernières semaines ses initiatives de coopération avec la Russie. Un refroidissement des relations pour plaire à Washington, qui soutient le candidat rival Kilicdaroglu, en tête dans les sondages. Alors que fait Kilicdaroglu ? Il annonce qu'il renforcera la coopération avec Moscou s'il gagne.

Les déclarations dans une campagne électorale, on le sait, ont très peu de valeur (en Italie, quelqu'un avait même promis un blocus naval pour empêcher l'arrivée d'immigrés clandestins), mais elles sont intéressantes pour évaluer les humeurs et les tendances. Et, pour l'instant, la tendance est d'ignorer complètement le "plan Mattei" qui a tant enthousiasmé les ministres italiens. Hormis la Tunisie, en mal d'argent, d'où qu'il vienne et sans contrepartie, le reste de la Méditerranée, le Proche-Orient et l'Afrique subsaharienne ignorent superbement le projet italien. Mais il vaut mieux éviter d'interrompre le sommeil de Tajani, Crosetto et de Lady Garbatella (= surnom de Giorgia Meloni, ndt).

La géopolitique de l'eau

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La géopolitique de l'eau

Leonid Savin

Source: https://www.geopolitika.ru/article/geopolitika-vody

Le facteur de l'hydrohégémonie devient un atout important dans les conflits de politique étrangère.

L'eau est traditionnellement considérée comme l'une des ressources les plus importantes dont l'accès doit être garanti. Elle est directement liée à la sécurité alimentaire, c'est-à-dire à l'agriculture, mais s'applique également à tous les types d'industrie (puisque l'eau est nécessaire à une grande variété de cycles de production, de la création de semi-conducteurs au fonctionnement d'équipements standard) et à la production d'électricité.

Les problèmes d'accès aux sources d'eau entraînent automatiquement des effets négatifs tels que les migrations, les épidémies, le déclin économique et les conflits. Le concept d'hégémonie de l'eau est donc apparu dans le contexte de la souveraineté des États (ou plutôt de l'interaction des souverainetés des différents États et de leurs intérêts nationaux). L'hydrohégémonie est une hégémonie au niveau du bassin fluvial, obtenue grâce à des stratégies de gestion de l'eau telles que l'accaparement des ressources, l'intégration et l'endiguement (i).

Les stratégies sont mises en œuvre par le biais d'une variété de tactiques (par exemple, la coercition - la pression, les traités, l'accumulation de connaissances, etc.) qui sont rendues possibles par l'exploitation des asymétries de pouvoir existantes dans un contexte institutionnel international faible.

Les processus politiques extérieurs au secteur de l'eau façonnent les relations hydropolitiques de diverses manières, allant des avantages tirés d'une coopération hégémonique aux aspects déloyaux de la domination. Le résultat de la concurrence en termes de contrôle de la ressource est déterminé par la forme que prend l'hégémonie, généralement en faveur de l'acteur le plus puissant. L'établissement d'une position dominante dans la gestion d'un système fluvial peut être considéré comme un outil attrayant pour un acteur hégémonique en place, car il lui permet de fixer unilatéralement des objectifs nationaux au-dessus de ceux des autres agents. En outre, le contrôle unilatéral crée un effet de levier politique sur les pays en aval (ii).

Zeitoun et Warner ont donc étudié des bassins fluviaux tels que le Jourdain, le Nil, l'Euphrate et le Tigre, mais le modèle pourrait également s'appliquer à d'autres régions - en Asie, en Europe, dans les Amériques. Mais il y a aussi des cas plus proches de nous. Le barrage hydroélectrique de Rogun, au Tadjikistan, a déjà provoqué des tensions entre le Tadjikistan et l'Ouzbékistan (iii).

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La répartition de l'eau est toujours un problème en Asie centrale

Par exemple, le deuxième plus grand lac d'Asie, le lac Balkhash au Kazakhstan, est directement lié au fleuve Ili, dont les sources se trouvent en Chine. L'écosystème Ili-Balkhash couvre 400.000 kilomètres carrés, soit plus que la Grande-Bretagne, le Danemark, la Suisse, les Pays-Bas et la Belgique réunis. Auparavant, la consommation d'eau en Chine même, destinée à approvisionner la région autonome ouïgoure du Qinjiang et à répondre à la demande de l'industrie locale, avait fait baisser le niveau du fleuve, ce qui se traduisit par une diminution rapide de la profondeur du lac (iv). Ces dernières années, le développement des terres et l'expansion des rizières en Chine se sont poursuivis, ce qui se traduit par une diminution du volume d'eau dans le Balkhash (v). Il faut tenir compte du fait que les pénuries d'eau entraînent également la désertification et la perte de fertilité des sols (vi). Il s'agit là d'un phénomène universel. Des conflits similaires à ceux qui opposent le Tadjikistan et l'Ouzbékistan ont lieu dans d'autres régions.

Par exemple, les différends concernant l'eau du fleuve Brahmapoutre sont depuis longtemps une cause de friction politique entre l'Inde et la Chine. En avril 2010, lors de la visite du ministre indien des affaires étrangères S. M. Krishna à Pékin, les Chinois ont désigné pour la première fois une zone du Brahmapoutre où le barrage original de Zangmu, au Tibet, devait être construit. Les fonctionnaires chinois ont assuré à l'Inde que les projets se dérouleraient normalement et ne créeraient pas de pénurie d'eau en aval. En réponse aux demandes ultérieures de l'Inde pour plus d'informations sur les projets, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères, Hong Lei, a déclaré : "La Chine adopte une attitude responsable à l'égard des projets de transbordement: "La Chine adopte une attitude responsable à l'égard du développement des eaux transfrontalières. Notre politique est que la protection va de pair avec le développement, et nous prenons pleinement en compte les intérêts des pays en aval" (vii).

De plus amples informations sur le projet de barrage ont été publiées dans le cadre de l'actuel plan énergétique quinquennal de la Chine, rendu public en janvier 2013. Ce plan comprenait des propositions de construction de trois barrages de taille moyenne sur le fleuve Yarlung Zangbo. Cela a eu pour effet d'accroître les tensions entre les deux pays, car l'Inde n'a pas été consultée avant le dévoilement du plan et n'en a eu connaissance que par la presse chinoise. Le gouvernement indien a donc été contraint de protester vigoureusement. Le conflit entre les deux pays ne s'est pas arrêté là.

Lorsque la Chine a achevé la construction du projet hydroélectrique de Zangmu (510 MW) au Tibet en octobre 2015, la plupart des médias indiens se sont inquiétés du fait que le barrage empêchait l'eau de s'écouler dans le Brahmapoutre en aval (viii). Un fonctionnaire du ministère chinois des affaires étrangères a fait remarquer que Zangmu faisait partie du projet Riverside et qu'il ne retarderait donc pas l'écoulement de l'eau.

En effet, ce projet ne retient pas l'eau, mais le limon, lui, est retenu, ce qui a un impact sérieux sur la fertilité en aval. Techniquement, le projet construit un barrage pour détourner l'eau de la rivière vers le tunnel. Le barrage détourne généralement entre 70 et 90 % de l'eau, en fonction du permis environnemental obtenu. Cette eau chargée de limon est d'abord déviée vers un bassin de décantation afin que le limon puisse se déposer au fond. En effet, celui-ci brise les arêtes des pales des turbines. L'eau débarrassée du limon est ensuite acheminée dans un long tunnel au bout duquel elle tombe verticalement sur les pales de la turbine. La rotation de la turbine produit de l'électricité. L'eau est ensuite redirigée vers la rivière. De cette manière, l'eau elle-même n'est pas retenue. Mais les boues elles-mêmes se déposent au fond du premier réservoir et sont rejetées dans le lit de la rivière, juste en aval du mur du barrage. La question est de savoir si la force de l'eau qui s'écoule du barrage est suffisante pour transporter une proportion significative de cette boue en aval. Dans la plupart des cas, ce n'est pas possible.

Or, c'est ce limon qui rétablit la fertilité des sols en aval, ce qui rend cette question cruciale.

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L'Himalaya est la chaîne de montagnes la plus jeune du monde et les fleuves qui en descendent reconstituent la fertilité des sols dans certaines des plus anciennes régions cultivées de la planète, dans toute l'Asie. Le delta du Gange, du Brahmapoutre et de la Meghna est presque entièrement composé de ce limon. Des questions controversées se posent également en Thaïlande. Plusieurs barrages sur le Mékong, tels que ceux de Pak Beng et de Luangphabang, sont prévus dans la région, mais certains pensent qu'ils ne sont pas nécessaires pour le système électrique thaïlandais. La société civile et la population thaïlandaises s'interrogent également sur la possibilité d'acheter davantage d'électricité aux pays voisins, y compris les barrages sur le Mékong à Pak Beng et Luang Prabang. Depuis l'année dernière, chaque ménage voit sa facture d'électricité augmenter chaque mois. Ils se demandent "à quoi bon acheter davantage alors que nous disposons déjà d'un énorme excédent énergétique de plus de 50 %" (ix), puisque le coût principal est supporté par les contribuables. Les écologistes tirent également la sonnette d'alarme car ils estiment que l'équilibre naturel sera perturbé.

En ce qui concerne la Russie, la situation concernant la répartition des ressources en eau est différente selon la localisation de la frontière. Par exemple, la frontière russo-finlandaise (1200 km) compte environ 450 rivières, ruisseaux et lacs. Leur cours est généralement orienté vers la Russie et les principales rivières sont la Vuoksa, la Hiitolanjoki et la Tuloma. Le débit total est de 780 mètres cubes par seconde. Il existe quatre centrales hydroélectriques sur la Vuoksa, deux en Finlande et deux en Russie. La Commission finno-russe sur l'utilisation des eaux frontalières s'occupe de la régulation du débit de l'eau. Étant donné que le cours supérieur des rivières se trouve en Finlande, Helsinki a théoriquement plus de chances d'exercer une hégémonie sur l'eau que Moscou.

En ce qui concerne le Kazakhstan, la Russie a une position équilibrée, puisque l'Oural coule en Russie, tandis que le Tobol, l'Ishim et l'Irtych coulent au Kazakhstan. Il n'y a pas eu de problèmes d'eau entre les deux pays en ce qui concerne ces fleuves. Cependant, le cours supérieur de l'Irtych se trouvant en Chine, il en résulte un différend trilatéral et Pékin se montre réticent à répondre aux demandes russes et kazakhes de réglementer l'utilisation et la protection des ressources en eau. En ce qui concerne l'Ukraine, la Russie a un avantage majeur en contrôlant le cours supérieur des principaux affluents du Dniepr - les grands fleuves Desna, Psel, Seim et Voskla. Il convient d'ajouter que le Belarus, pays allié, contrôle les fleuves Pripyat et Dniepr.

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La Russie pourrait potentiellement utiliser sa position stratégique, non seulement sur le plan géoéconomique, mais aussi sur le théâtre des opérations militaires.

En particulier, des véhicules de surface et sous-marins sans pilote pourraient être lancés dans ces fleuves pour recueillir des renseignements. De tels modèles sont en service dans l'armée américaine, et certains d'entre eux sont fabriqués sous la forme de poissons, ce qui constitue un déguisement extérieur. Idéalement, l'utilisation de ces véhicules permettrait de créer un réseau fiable de capteurs afin d'obtenir des informations opérationnelles (par exemple, sur les mouvements d'équipements sur les ponts ou sur l'activité à proximité des véhicules spéciaux qui se trouvent à proximité des berges). Si le besoin d'une telle activité persiste, cet atout hydrohégémonique pourrait être un outil utile pour affronter l'ennemi. 

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Notes:

(i) Zeitoun, M., & Warner, J. (2006). Hydro-hegemony-a framework for analysing transboundary water conflicts (L'hydro-hégémonie : un cadre pour l'analyse des conflits transfrontaliers liés à l'eau). Water policy, 8(5), 435-460.

(ii) Energy Transitions and Geopolitics in South Asia : The Contest for Hydro-Hegemony on the Brahmaputra. https://www.efsas.org/publications/articles-by-efsas/energy-transitions-and-geopolitics-in-south-asia/

(iii) https://cyberleninka.ru/article/n/spory-vokrug-rogunskoy-ges.

(iv) https://www.thenewhumanitarian.org/report/71924/kazakhstan-efforts-under-way-save-lake-balkhash

(v) https://tengrinews.kz/kazakhstan_news/obmelenie-balhasha-osobo-progressiruet-poslednie-godyi-444432/

(vi) https://www.who.int/news-room/questions-and-answers/item/climate-change-land-degradation-and-desertification.

(vii) Mark Christopher. Water Wars : The Brahmaputra River and Sino-Indian Relations' (2013). Études de cas CIWAG. https://digital-commons.usnwc.edu/ciwag-case-studies/7/

(viii) Joydeep Gupta. Brahmaputra dams hold back silt, not water. 6 novembre 2015. https://www.thethirdpole.net/en/energy/tibet-dams-hold-back-silt-not-water/

(ix) Tyler Roney. Interview : "Le peuple thaïlandais doit avoir son mot à dire sur l'énergie hydroélectrique du Mékong". 31 janvier 2023. https://www.thethirdpole.net/en/energy/interview-pai-deetes-thai-people-need-say-in-mekong-hydropower/

 

vendredi, 17 mars 2023

L'Indonésie, invisible mais présente dans le Pacifique

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L'Indonésie, invisible mais présente dans le Pacifique

Peter Logghe

Source: Nieuwsbrief Deltapers, No. 178, Mars 2023
 
On connaît les grands acteurs géopolitiques dans et autour du Pacifique : la Chine bien sûr, et le Japon, Taiwan et l'ex-Indochine française, l'Inde, l'Australie. L'Indonésie n'est quasiment jamais citée dans la liste des "grands acteurs géopolitiques", alors que, par sa population et sa situation géographique unique, elle sera plus que décisive dans cette partie du monde, le sud-est de l'Asie en d'autres termes. Plusieurs géopolitologues prédisent déjà que les plus grandes tensions mondiales risquent de se produire dans cette région. Nous nous appuyons pour les données factuelles sur une récente contribution du Prof. Em. Jean-Marc Holz (Université de Perpignan) dans la revue française de géopolitique Conflits (n° 44, page 33 et suivantes).

3663322123436.jpgL'Indonésie, avec ses 275,8 millions d'habitants, est le 4ème pays le plus peuplé de la planète, et c'est le plus grand pays musulman du monde. Son territoire comprend plus de 16.000 îles. Sa situation géographique est d'une importance exceptionnelle: elle est à la fois pont entre deux continents (Asie et Océanie) et à cheval sur deux océans, l'océan Indien et l'océan Pacifique. Le fait que le pays soit passé inaperçu sur la scène internationale peut être attribué aux options politiques prises après la déclaration d'indépendance du 17 août 1945. L'Indonésie a été le premier pays à se libérer d'une puissance coloniale (les Pays-Bas), et c'est peut-être pour cette raison qu'elle a choisi une politique étrangère indépendante dès le départ. Ce n'est pas un hasard si l'Indonésie, avec l'Inde, a pris la tête du mouvement des non-alignés. 

Une position d'indépendance internationale comme condition pour maintenir l'unité du pays ? 

Le fait est, écrit le professeur Jean-Marc Holz, que la jeune république indépendante n'a pas eu la vie facile et a dû faire face à toutes sortes de mouvements séparatistes (Java Ouest, Sulawesi, Moluques, etc.), en plus des poussées d'un puissant parti communiste (avec 6 millions de membres à l'époque), et de toutes sortes d'États islamiques. Les Américains ont tenté de toutes leurs forces de rallier l'Indonésie à leur cause dans la lutte contre l'avancée du communisme. Sukarno a tenu l'Indonésie à l'écart de ces défis internationaux et s'est efforcé de maintenir l'unité du pays. Suharto prend le pouvoir par un coup d'État militaire le 30 septembre 1965 et exerce des représailles contre les Chinois de l'île et les communistes du PKI, tenus pour responsables des troubles locaux et du coup d'État militaire qui s'en est suivi. Suharto rompt avec la tradition de rapprochement avec la Chine de Sukarno et interdit le PKI.

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En août 1967, l'ANASE est créée et Jakarta en prend la direction, avec un double objectif : l'intégration économique régionale et l'arrêt de l'expansion communiste en Asie. Une dictature règne en Indonésie, mais elle fait croître l'économie comme jamais auparavant : entre 1965 et 1998, le PIB passe de 58,1 milliards de dollars à 430 milliards de dollars. Pourtant, les vieux démons restent actifs: en 1975, c'est la guerre civile au Timor, et le pays devient lentement mais sûrement la proie d'une islamisation croissante sous l'influence de prédicateurs salafistes arabo-yéménites. Le régime militaire, impliqué dans de nombreuses affaires de corruption, tombe en 1998. Un musulman modéré, A. Wahid, arrive au pouvoir et tente de fédérer les différents courants conflictuels autour de sa politique, mais les trois démons restent à l'œuvre: la corruption, les mouvements séparatistes et, surtout, l'islamisation rampante de la société indonésienne. Entre 1998 et 2001, elle a recensé 50 attentats (majoritairement islamistes).

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Importance géopolitique de l'Indonésie
 
L'Indonésie est en quelque sorte la gardienne de plusieurs détroits stratégiques entre l'Asie, l'Europe et le Moyen-Orient, et elle occupe un rôle clé dans le Pacifique. Le détroit de Malacca est le fer de lance du commerce maritime international, avec 85.000 passages par an, 2 milliards de tonnes de trafic, dont une part particulièrement importante de pétrole du Moyen-Orient. Il représente 80 % de l'approvisionnement en pétrole de la Chine ! Il y a aussi les détroits de Probe, d'Ombai et de Wetar. Une région que la Chine lorgne également, la superpuissance asiatique ayant tenté d'installer un radar au Timor.

Outre sa position stratégique, les matières premières constituent également un atout majeur : gaz, caoutchouc naturel, biogaz, charbon et nickel (l'Indonésie est le premier exportateur mondial de nickel).

Jusqu'à présent, l'Indonésie a réussi à se tenir à l'écart de la surenchère sino-américaine, s'entêtant à maintenir sa neutralité. L'Indonésie se réfère toujours au non-alignement comme principe directeur et le met en œuvre dans la sphère économique : dans tous les secteurs économiques, les entreprises sont entourées de holdings d'État.

L'Indonésie compte 7 millions de Chinois sur son territoire. La Chine inonde l'île d'investissements et a supplanté le Japon comme principal partenaire commercial de l'Indonésie. Au sein de l'ONU, l'Indonésie semble parfois suivre la Chine : elle a par exemple voté contre l'ouverture d'une enquête sur la question des Ouïgours. L'Indonésie considère la montée en puissance économique de la Chine comme une opportunité plutôt que comme une menace. Par exemple, les sociétés chinoises d'Internet Huawei et ZT ont pu s'imposer en Indonésie comme les principaux opérateurs de la transformation électronique dans l'archipel. 

Mais en même temps, l'Indonésie se rapproche des États-Unis en termes de politique de sécurité, affirme le professeur émérite Jean-Marc Holz. L'offre militaire de Washington est importante et les dépenses militaires de l'Indonésie augmentent, tandis que l'archipel porte une attention particulière à son indépendance : il n'y a pas de bases militaires étrangères sur son territoire. En 2015, par exemple, l'Indonésie s'est engagée dans un partenariat stratégique global avec les États-Unis. On pourrait dire que c'est le reflet de l'accord conclu par l'Indonésie avec la Chine en 2005. Le peuple indonésien semble s'accommoder de cette position de non-alignement : la seule question est de savoir combien de temps cet État stratégiquement important d'Asie du Sud-Est sera capable de résister aux pressions extérieures. Combien de temps l'Indonésie restera-t-elle ce "géant invisible", comme l'indique le titre de la contribution du professeur Holz ?
 
Peter Logghe 

mardi, 14 mars 2023

Beijing gagne la partie de Go (encercler)

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Beijing gagne la partie de Go (encercler)

par Antonio de Martini

Source : Antonio de Martini & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/il-gioco-del-go-accerchiare-lo-vince-pechino

La réouverture des communications entre l'Arabie Saoudite et l'Iran met fin à une ère de domination anglo-américaine dans la zone MENA (Middle East and North Africa) qui a commencé en 1915 avec la création de l'IPC (Iranian Petroleum Company), une société à capitaux publics voulue par Churchill, qui a commencé avec la reconversion de la flotte du charbon au naphte, grâce à la méga-raffinerie d'Abadan.

À la base de toute stratégie, on a toujours vu la tendance - qui avait déjà fait ses preuves sur le continent européen avec l'introduction du concept de "balance of power" qui divisait l'Europe continentale, laquelle est restée une entité unique même après la chute de l'empire occidental - à opposer les différents potentats et à opérer dans une fonction d'arbitrage.

À la rivalité israélo-palestinienne s'est ajoutée la difficile rivalité entre l'Iran et l'Arabie saoudite, après que l'effondrement irakien s'est révélé insuffisant pour contrer les Ayatollahs.

Sur la carte, œuvre de Cyrous Ashtari Tafti, les premiers bénéficiaires possibles de la détente sont indiqués : le Liban, avec une élection présidentielle bloquée depuis huit mois et onze tours électoraux restés vains; le Yémen, déchiré par une guerre qui atteint sa onzième année; le Qatar, mis à l'index par les Saoudiens et les Emiratis pour ne pas avoir isolé l'Iran conformément aux décisions des Etats-Unis et de leurs satellites.

L'échange d'ambassadeurs aura lieu dans deux mois, mais les contacts, notamment à Pékin, ont déjà commencé.

Tous deux sont d'infatigables négociateurs mais conscients de l'urgence d'une nouvelle politique énergétique mondiale et unis, ils sont une superpuissance. Divisés, ils ont laissé le marché aux Etats-Unis.

Puis, petit à petit, ils aborderont le super dossier de la guerre syrienne qui les oppose.

Les deux pétro-puissances auront l'opportunité de contrôler les routes du pétrole (du Golfe Persique à Suez), de se partager le marché pétrolier asiatique (avec l'Indonésie), de réduire les allocations de défense et de pouvoir se diversifier en Mésopotamie et au Soudan au lieu d'investir dans les pays anglo-saxons et d'être à la merci de sanctions unilatérales sur la base de valeurs commodes et non partagées. Vous verrez les États-Unis commencer à chercher (à Djibouti ?) une nouvelle base pour la 5e flotte basée à Bahreïn. Trop exposée maintenant.

Celui qui ne dort déjà plus, c'est Netanyahou qui pensait ne pas avoir à se réguler en se déchaînant contre un Iran isolé et qui va se retrouver embarqué dans un Nouvel Ordre Mondial auquel il ne s'attendait pas et qui ne promet rien de bon.

 

La Chine est-elle à bout de patience avec les États-Unis?

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La Chine est-elle à bout de patience avec les États-Unis?

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2023/03/07/onko-kiinan-karsivallisyys-yhdysvaltojen-suhteen-loppumassa/

Comme le rapporte le Wall Street Journal, le président chinois Xi Jinping s'est montré "inhabituellement franc en critiquant la politique américaine et en imputant à la campagne de répression menée par Washington contre la Chine la responsabilité des récents défis auxquels son pays est confronté".

"L'Occident, dirigé par les États-Unis, a mené une campagne d'isolement, de blocus et de répression contre nous, ce qui a posé des défis sérieux et sans précédent au développement de notre pays", a déclaré M. Xi, selon les médias d'État chinois lundi.

Les commentaires de M. Xi constituent un changement inhabituel pour un dirigeant qui s'est généralement abstenu de critiquer directement les États-Unis dans ses déclarations publiques. D'un autre côté, au cours de son long mandat, M. Xi a fait preuve d'un pessimisme croissant à l'égard des relations entre l'Occident et les grandes puissances de l'Est.

Les accusations selon lesquelles les États-Unis ont étouffé le développement de la Chine au cours des cinq dernières années ont fait partie d'un discours prononcé par M. Xi devant les membres de l'organe consultatif politique suprême de la Chine, la session législative annuelle à Pékin.

Les médias américains estiment qu'en évoquant les États-Unis dans des termes chargés de connotations de l'époque de la guerre froide, le dirigeant chinois poursuit la rhétorique nationaliste que les fonctionnaires de rang inférieur et les médias d'État ont utilisée pour critiquer Washington au cours de ces dernières années.

Selon le président Biden, les États-Unis sont en concurrence avec la Chine, mais ne veulent pas de conflit. Dans le même temps, les tensions bilatérales persistent sur le commerce, la technologie, l'influence géopolitique et l'opération militaire de la Russie en Ukraine.

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Bien que l'administration Biden puisse affirmer qu'elle ne veut pas de conflit, la stratégie de sécurité nationale actualisée met l'accent sur la "rivalité historique entre les démocraties et les autocraties", ce qui, avec d'autres déclarations américaines, a été interprété en Chine comme un signe que Washington cherche à remplacer le régime socialiste de Pékin par un régime fantoche pro-occidental.

Comme dans le cas de la Russie et de l'Ukraine, Washington se réjouirait certainement d'une nouvelle guerre par procuration qui attirerait l'attention des médias sur la Chine : il a été suggéré que Taïwan, le Japon ou même l'Australie essaieraient d'être manipulés pour mener une véritable guerre contre la Chine.

Les autorités chinoises ont depuis longtemps mis en garde les États-Unis contre ce que l'on appelle la "pensée de la guerre froide", mais la réponse américaine est que la rhétorique de Xi à l'égard de l'administration Biden commence à prendre des accents similaires.

Le président chinois a semblé faire valoir un point de vue similaire, par exemple, lors de son sommet de novembre avec Joe Biden. À l'époque, M. Xi avait déclaré que "la répression et la retenue ne feront que renforcer la volonté et le moral du peuple chinois".

Les porte-parole officiels du ministère chinois des affaires étrangères, qui s'adressent souvent aux journalistes étrangers sur un ton acerbe lors de réunions d'information régulières, ont utilisé à plusieurs reprises un langage similaire. Selon le nouveau ministre chinois des affaires étrangères, Qin Gang, "le conflit est inévitable si Washington ne change pas d'approche".

Dès le mois d'octobre dernier, Xi a envoyé un message sinistre à ses camarades lors du congrès du parti, déclarant que "les tentatives extérieures de répression et d'endiguement de la Chine pourraient s'intensifier à tout moment". À l'époque, les États-Unis n'avaient pas été mentionnés directement, mais il semble que la patience du régime chinois face aux provocations et à la guerre commerciale soit finalement à bout.

lundi, 06 mars 2023

De l'Inde à l'Afrique, les tournées européennes ne sont pas à la hauteur des résultats annoncés

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De l'Inde à l'Afrique, les tournées européennes ne sont pas à la hauteur des résultats annoncés

Augusto Grandi

Source: https://electomagazine.it/dallindia-allafrica-i-tour-euro...

Lady Garbatella (= Giorgia Meloni) s'envole pour l'Inde et les clercs de la désinformation italienne assurent que les résultats certains de cette visite inclueront la condamnation de la Russie par New Delhi.  Manifestement, le premier ministre indien ne suit pas les médias italiens et n'exprime donc pas la moindre condamnation de Moscou avec qui, au contraire, les relations économiques et financières se sont intensifiées depuis le début de la guerre en Ukraine.  Il est vrai que ce n'est pas Meloni qui s'est lancé dans des annonces dépourvues de signification, mais un démenti de temps en temps, son service de presse peut tout de même essayer d'en faire un.

Mais ce n'est pas comme si, sur la scène internationale, le rival de Lady Garbatella, Emmanuel Macron, faisait mieux, puisqu'il est en tournée en Afrique pour faire oublier les manifestations qui se succèdent sur le sol français et récupérer un peu d'espace et de crédibilité sur le continent noir où sévissent la Chine et la Russie, mais aussi l'Inde et la Turquie. Le pauvre Macron arrive au Gabon et l'accueil est froid. Puis, pourtant, l'environnement se réchauffe en République démocratique du Congo. Pas dans le sens espéré par le président français.  Il est interpellé et insulté par une population qui accuse l'Hexagone de soutenir le Rwanda, coupable d'avoir perpétré des massacres au Congo.

Pour compléter le tableau des difficultés croissantes de la politique étrangère d'une Europe au service de Washington, l'ONU condamne la politique répressive menée par le gouvernement algérien.  Mais comment ? L'Algérie tant encensée par Lady Garbatella et les ministres du gouvernement de droite et du centre, avec le soutien total des clercs de la désinformation italienne, pourquoi nous vend-elle à un prix élevé le gaz que nous achetions auparavant à un prix beaucoup plus bas à la Russie ?  L'Algérie, partenaire clé du fantômatique "plan Mattei" ?

Il est évident qu'il s'agit d'une sale manœuvre de Poutine, qui contrôle l'ONU, pour mettre sous un mauvais jour un pays ami de l'Italie atlantiste.  Dommage qu'en réalité Alger soit un partenaire stratégique de Moscou.  Mais cela a dû échapper aux clercs du journalisme italien.

Les buts et objectifs actuels de la Russie dans l'Arctique

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Les buts et objectifs actuels de la Russie dans l'Arctique

Alan Gotchiyaev

Source: https://www.geopolitika.ru/article/sovremennye-celi-i-zadachi-rossii-v-arktike

L'Arctique russe dans le contexte de la crise des relations de la Russie avec les États arctiques.

Les premières explorations de la Russie dans la région arctique ont commencé dès le siècle dernier, il y a plus de cent ans. À cette époque, le ministère des Affaires étrangères de l'Empire russe a envoyé une note aux gouvernements des pays alliés indiquant que la Russie était propriétaire des terres et des îles situées au nord de la côte asiatique de l'empire. Des expéditions ont alors été menées avec les brise-glace Vaigach et Taimyr. En conséquence, les îles Bennett, Herald, Jeanette, Henrietta et Solitude ont été incluses dans l'empire [2, P. 64-66].

Toutes les terres et les îles découvertes depuis 1916 ont ensuite été transférées sous l'administration de la RSFSR en 1924, et deux ans plus tard, le décret du Présidium de la CCE de l'URSS a défini que "le territoire de l'Union de la RSS est constitué de toutes les terres et îles, à la fois découvertes et celles qui pourraient l'être ultérieurement, situées dans l'océan Arctique au nord de la côte de la RSS jusqu'au pôle Nord entre le méridien 320 degrés 4' 35'' à l'est de Greenwich, longeant le côté est de la baie de Vaida jusqu'au repère de triangulation du cap Kekurskoe, et le méridien de 168 deg. 49' 30' à l'ouest de Greenwich, passant par le milieu du détroit séparant les îles de Ratmanov et le groupe Kruzenshtern (Krusenstern) des îles Diomid dans le détroit de Béring" [15 avril 1926 - Le statut juridique des possessions arctiques de l'Union soviétique est déterminé. // GoArctic. 15.04.2020]. Les dispositions de ce décret sont restées pratiquement inchangées jusqu'en 1985, lorsque l'expédition du brise-glace Kapitan Dranitsyn, dirigée par R.R. Gaidovsky, a découvert un nouveau détroit séparant l'île de Northbrook. En conséquence, le détroit a été nommé d'après le chef-découvreur de l'expédition, et les îles sont devenues connues sous le nom de West et East Northbrook [2, P. 67].

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Au 21ème siècle, une étape importante dans la définition des territoires arctiques de la Russie a été la signature du décret "Sur les territoires terrestres de la zone arctique de la Fédération de Russie" du 02.05.2014, selon lequel les districts autonomes de Yamal-Nenets, de Nenets et de Tchoukotka, les régions d'Arkhangelsk et de Mourmansk, la République de Iakoutie et de Komi, le territoire de Krasnoïarsk, les districts de Carélie de Belomorsk, Louhsky et Kemsky ainsi que " les terres et les îles situées dans l'océan Arctique et certains ulus de Iakoutie, qui ont été déclarés territoire de l'URSS par la résolution du Présidium du Comité exécutif central de l'URSS du 15 avril 1926. "Ces territoires faisaient partie de la partie russe de l'Arctique [Décret du Président de la Fédération de Russie "Sur les territoires terrestres de la zone arctique de la Fédération de Russie"].

L'infrastructure côtière de l'Arctique russe est formée par une vingtaine de ports, dont les ports de Khatanga, Naryan-Mar, Sabetta, Dudinka, Dikson, Varandey, Mourmansk, Arkhangelsk, Onega, Mezen, Kandalaksha, etc. En 2017, ces ports de l'Arctique occidental ont traité plus de 70 millions de tonnes de marchandises, dont des ressources naturelles pétrolières et gazières. Dans l'Arctique oriental, les ports maritimes de Provideniya, Beringovsky, Egvekinot, Tiksi, Pevek et Anadyr, construits au milieu du 20e siècle, ont un rôle militaro-stratégique et traitent des volumes de marchandises pas si importants - un peu plus de 1% des marchandises des autres ports de l'Arctique russe [1, P. 95].

Les principaux sont les ports de Nakhodka, Vladivostok et Vanino, qui traitent des blocs de conteneurs pour le stockage de carburant et de lubrifiants, divers types de machines et de matériaux de construction, du carburant, du charbon (qui, entre autres, est transporté vers la RPC depuis les ports de Beringovsky et Pevek), ainsi que des ressources pour les établissements situés le long des rivières Kolyma, Indigirka, Yana, Olenek et Khatanga [Ibid, P. 95].

Malgré les volumes impressionnants de marchandises transitant par les ports, ceux-ci sont longtemps restés dans un état technique moins que parfait. "La plupart des ports maritimes de l'Arctique constituent aujourd'hui le maillon faible du NSR. En raison d'un manque de fonds, les ports n'ont pas modernisé leurs équipements techniques, ni dragué leurs approches et leurs embouchures", a commenté V.A. Popov du Collège maritime du gouvernement russe en 2021 [Les ports arctiques commencent une nouvelle vie. // GoArctic. 16.02.2021]. En raison des problèmes susmentionnés, la rotation des cargaisons et la capacité de débit des ports diminuent constamment. Par exemple, le traitement des marchandises au port de Tiksi est passé de 860.000 tonnes de marchandises depuis 1986 à 33.000 tonnes en 2019, et sa capacité n'est utilisée qu'à 50% maximum (Ibid.).

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Aujourd'hui, l'importance de la recherche dans la région n'a pas diminué, car l'Arctique produit plus de 80 % de son gaz naturel et possède un pourcentage élevé de réserves pétrolières, et parce que la route maritime du Nord est un important corridor de transport et de commerce qui doit être maintenu.

À cette fin, et malgré les sanctions, les diverses crises et l'état technique moins qu'idéal des ports, la construction de nouveaux terminaux dans l'Arctique s'est poursuivie, principalement à proximité des gisements de gaz, de pétrole et de charbon, et l'État a déjà soutenu ces projets à hauteur de plus de 110 milliards de roubles. La corporation d'État Rosatom et le ministère russe des transports, auquel l'administration de la route maritime du Nord doit rendre compte du développement des ports aujourd'hui [Nouveaux terminaux dans la zone arctique de la Russie. // Maritime News of Russia. 06.04.2022].

Par exemple, cinq projets d'investissement d'une valeur de plus de 100 milliards de roubles doivent être mis en œuvre près du port de Mourmansk, ce qui inclut la construction de terminaux pour le transbordement de charbon et de gaz naturel liquéfié. Il est également prévu d'ouvrir le terminal Tuloma ici en 2023 pour desservir PhosAgro, qui produit des engrais minéraux. La holding de pêche Norebo prévoit d'ouvrir le terminal Udarnik pour traiter les cargaisons réfrigérées et congelées. "Rosatom", quant à lui, prévoit de construire un terminal séparé pour le fret par conteneurs d'ici 2024, en espérant que jusqu'à 800.000 conteneurs par an seront expédiés par le NSR à l'avenir. Dans la baie d'Ura, près de Mourmansk, la construction du plus grand complexe de transbordement de gaz naturel liquéfié par Novatek est prévue pour 2023, avec une capacité de plus de 40 millions de tonnes, ce qui coûtera 70 milliards de roubles. À Arkhangelsk, un projet de construction de deux terminaux destinés à traiter les engrais minéraux, les cargaisons de pétrole, les condensats de gaz, etc. sera réalisé en deux phases jusqu'en 2028. Le coût de la construction est estimé à près de 150 milliards RUB. Un terminal Chaika de 10 millions de tonnes est déjà en cours de construction dans le port de Dickson, pour un coût de plus de 18 milliards de roubles, sous les auspices de la société d'infrastructure AEON, et Rosneft prévoit d'y ouvrir le terminal Bukhta Severn en 2024. [Ibid.]

Aujourd'hui, dans le contexte de la position de crise de la Russie au sein du Conseil de l'Arctique, l'aide internationale dans la région s'affaiblit. Néanmoins, comme on l'a appris à la fin de 2022 par les conclusions de N.V. Korchunov, président du Comité supérieur du Conseil de l'Arctique, les pays des BRICS et de l'OCS sont intéressés par la poursuite de la coopération avec la Russie dans la région arctique [Les BRICS et l'OCS sont intéressés par la coopération avec la Russie dans l'Arctique, a déclaré le ministère des Affaires étrangères. // RIA Novosti. 08.12.2022]. En outre, la VIIIe Conférence internationale "L'Arctique : développement durable" ("Arctic-2023") est toujours prévue pour les 2 et 3 mars 2023 à Moscou avec la participation de 600 personnes [VIIIe Conférence internationale de l'Arctique : développement durable. // Arktika-2023].

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En outre, Rosneft, en collaboration avec Innopraktika, un institut de développement non gouvernemental, prévoit de commencer des recherches sur l'impact des facteurs climatiques et anthropiques locaux sur les écosystèmes des mers arctiques dans la mer Blanche à l'été 2023. Des biopréparations seront également développées pour nettoyer les mers du Nord de la pollution par les hydrocarbures. Le but du projet est de réaliser le modèle géologique le plus fiable de l'Arctique russe [Rosneft poursuivra l'exploration de l'Arctique en 2023. // Nezavisimaya Gazeta. 07.02.2023]. Outre le fait qu'une étude approfondie de la région et des projets conjoints entre scientifiques et entreprises permettront de garantir une navigation toute l'année sur le NSR, les problèmes de réchauffement de l'Arctique seront également abordés, car au cours des dernières décennies, les températures y ont augmenté plus rapidement que partout ailleurs dans le monde, à savoir: l'air arctique s'est réchauffé de 4°C depuis 1960. Des chercheurs allemands de l'Université de Potsdam et de l'Institut Alfred Wegener pour la recherche polaire et marine ont exprimé leur intérêt pour l'Arctique. L'Institut Alfred Wegener pour la recherche polaire et marine s'est dit préoccupé par ce fait et a souligné qu'avec le réchauffement, la végétation de conifères commence à empiéter sur la toundra et que "si les émissions de gaz à effet de serre tombent à zéro d'ici 2100 et que les températures moyennes n'augmentent pas de plus de 2°C sur l'ensemble du territoire, même dans ce cas, d'ici 2500, il restera environ un tiers de la zone de toundra dans le Chukotka et le Taimyr. Si, d'ici 2100, les émissions de gaz à effet de serre ne sont réduites que de moitié, il ne restera que 5,7 % de la toundra en forêt. [Retrait de la toundra. // Science et vie. 07.06.2022]. Tout cela affectera à la fois la flore et la faune de la région et la population locale.

Cependant, comme nous l'avons déjà noté, la poursuite de la coopération dans la région est remise en question, ce qui est un fait résolument négatif, car l'Arctique était probablement la seule région où la Russie et les pays occidentaux entretenaient des contacts étroits et pouvaient tirer un grand profit du développement conjoint de la région.

Néanmoins, la Russie prévoit toujours de construire diverses installations dans la région et de mener des recherches à grande échelle, tout comme d'autres pays arctiques. En janvier 2023, par exemple, une société minière suédoise a déclaré avoir découvert un important gisement de minéraux de terres rares dans sa partie de l'Arctique. Le gisement a été découvert par une société minière d'État, qui contrôle déjà deux grandes mines de fer au-delà du cercle arctique. Cette découverte s'est vu conférer un statut géopolitique important car elle contribuera à réduire la dépendance à l'égard des approvisionnements en éléments de terres rares en provenance de Chine (environ 60 % des éléments de terres rares sont importés de Chine) (La Suède découvre d'importants gisements de terres rares dans la région arctique. // Site Web socialiste mondial. 01.29.2023].

En Finlande également, dans le contexte de l'évolution des principes et des accents géopolitiques, tant au sein de la région arctique individuelle qu'au niveau mondial, on a décidé cette année de créer une nouvelle politique arctique qui pourrait servir de point de référence dans les nouvelles réalités. Dans le cadre de cet effort, le gouvernement finlandais a invité plusieurs représentants de différents pays à participer à la conférence Arctic Frontiers à Tromsø, en Norvège, la conférence la plus active sur le développement de l'Arctique et une occasion de débat international, pour discuter des changements dans l'Arctique et de la façon dont ils pourraient affecter les pays arctiques et la Finlande en particulier. Dans le même temps, les points clés de la politique arctique finlandaise seraient maintenus à l'avenir. "Le changement climatique et la biodiversité, le développement durable et les droits des peuples autochtones seront les priorités de la politique arctique de la Finlande à l'avenir", ont déclaré les représentants finlandais [La Finlande explore une nouvelle direction pour sa politique arctique. // Nouvelles du Grand Nord. 01.27.2023].

Ainsi, les objectifs et les priorités des pays dans ce bouleversement politique ont commencé à changer, tout comme de nombreux arrangements politiques dans le monde. L'Arctique ne fait pas exception. À l'heure actuelle, il est trop tôt pour dire quels changements fondamentaux les crises peuvent produire dans la région, mais il est juste de dire qu'à ce stade, les États de l'Arctique, y compris la Russie, mènent toujours des recherches, font de nouvelles découvertes et se préparent aux grands changements à venir, avec beaucoup moins de cohésion et de solidarité qu'auparavant.

Liste des sources :

    (1) Zaostrovskikh E.A. Seaports of the Eastern Arctic and supporting zones of the Northern Sea Route. // Regionalistika. 2018. №6. - 106 с. 

    (2) Lukin Y.F. L'Arctique russe se développe avec des îles. // AiS. 2015. №18. - 80 с.

dimanche, 05 mars 2023

La tournée de Blinken en Asie centrale

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La tournée de Blinken en Asie centrale

Source: https://katehon.com/ru/article/centralnoaziatskoe-turne-blinkena

Le secrétaire d'État américain Anthony Blinken a effectué une visite en Asie centrale du 28 février au 3 mars. Le 28 février, il a rencontré à Astana le président du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokayev. Il a également eu des entretiens avec son homologue, le ministre des Affaires étrangères du Kazakhstan, Mukhtar Tleuberdi. En outre, il a rencontré les ministres des Affaires étrangères des cinq pays d'Asie centrale à Astana (format C5+1). Le 1er mars, M. Blinken a rencontré le ministre ouzbek des Affaires étrangères Bakhtiyor Saidov et s'est entretenu avec le président ouzbek Shavkat Mirziyoyev à Tachkent.

Contre la Russie et la Chine

La rhétorique de Blinken et les déclarations officielles à la presse ne laissaient aucun doute. Le chef de la diplomatie américaine est venu en Asie centrale pour persuader les plus proches voisins de la Russie de soutenir les sanctions anti-russes ou au moins de condamner ses actions en Ukraine, creusant ainsi un fossé entre Moscou et ses partenaires d'Asie centrale. Au Kazakhstan, par exemple, il a remercié la république d'avoir fourni une aide humanitaire à l'Ukraine et d'avoir hébergé les 200.000 personnes qui ont fui la Russie après l'annonce de la mobilisation partielle. En Ouzbékistan, il a exhorté les médias locaux à ne pas diffuser la "propagande russe". Partout, il a exprimé son soutien à la souveraineté des pays de la région et approuvé les "réformes".

Lors d'une conférence de presse au Kazakhstan le 28 février, il a qualifié la Russie d'agresseur plus de dix fois. Au même moment, le chef du ministère des Affaires étrangères du Kazakhstan a déclaré qu'il ne voyait aucune menace de la part de la Russie. L'invité américain a également critiqué la Chine depuis Astana, menaçant de problèmes "non seulement dans les relations avec les États-Unis, mais aussi avec d'autres pays" si Pékin soutenait Moscou dans le conflit ukrainien. Lors d'une conférence de presse à Tachkent, Blinken a critiqué le plan de paix de la Chine dévoilé la veille. Le secrétaire d'État a accusé Pékin de "continuer à attiser les flammes du feu que Vladimir Poutine a allumé".

Lors d'une conférence de presse à l'issue d'une réunion avec les ministres des affaires étrangères du Kazakhstan, du Kirghizistan, de l'Ouzbékistan, du Turkménistan et du Tadjikistan, Blinken a également déclaré que les Etats-Unis étaient prêts à dédommager les pays d'Asie centrale pour les dommages causés par les sanctions anti-russes.

La question des sanctions

Pour les États-Unis, le problème est que le commerce de la Russie avec les pays d'Asie centrale augmente malgré les sanctions. Il s'agit en partie d'"importations parallèles". Les États-Unis ont déjà discuté avec les pays d'Asie centrale de la mise en œuvre de sanctions anti-russes. Il est bénéfique pour les pays de la région d'agir comme des ponts de la Russie vers le monde et les États-Unis devraient offrir quelque chose de valable (ou des sanctions sévères) pour contrebalancer les avantages évidents de la coopération avec la Russie et la Chine. Jusqu'à présent, l'aide que Washington promet - 25 millions de dollars pour tous les pays de la région, même si elle s'ajoute aux 25 millions de dollars promis en septembre dernier - ne correspond pas aux coûts d'une éventuelle adhésion aux sanctions anti-russes. Les Américains, cependant, pourraient utiliser la méthode de la carotte et du bâton en menaçant les économies locales de sanctions. Auparavant, Washington a imposé des sanctions à l'oligarque russo-ouzbek Alisher Usmanov, mais a ensuite retiré ses actifs des restrictions de blocage. Les Etats-Unis n'ont pas expliqué dans quel but ce geste de bonne volonté avait été fait.

Après la visite de Blinken aux États d'Asie centrale, le ministre kazakh des affaires étrangères a déclaré que, grâce aux consultations avec les Américains, Astana a pu éviter des sanctions secondaires.

Questions de sécurité

Comme l'a noté le ministre ouzbek des affaires étrangères par intérim, Bakhtiyor Saidov, les États-Unis et l'Ouzbékistan "partagent les mêmes priorités pour une Asie centrale prospère, stable et pacifique". La question de la sécurité - avec en toile de fond la situation problématique en Afghanistan où le gouvernement des Talibans ne peut faire face aux radicaux, y compris les terroristes de l'ISIS* (*organisation terroriste interdite en Russie) - inquiète les pays d'Asie centrale.

Les États-Unis pourraient bien profiter de ce problème (créé en grande partie par leurs propres actions et inactions en Afghanistan) en promettant de l'aide aux pays d'Asie centrale.

Les États-Unis ont un autre intérêt sécuritaire au Kazakhstan : les armes et munitions soviétiques qui pourraient être transférées en Ukraine. Auparavant, il a été signalé que des munitions étaient vendues depuis le Kazakhstan via des pays du Moyen-Orient. Il a été signalé que le Royaume-Uni supervisait ce projet.

Un autre problème non moins important est la sécurité biologique.

On sait qu'un nouveau laboratoire biologique américain est en cours de construction au Kazakhstan, dans le village de Gvardeyskiy, dans la région de Zhambyl. Un autre laboratoire de ce type est situé à Almaty. Selon les experts, les questions de fonctionnement des installations biologiques des États-Unis au Kazakhstan pourraient également être discutées à huis clos. En Ouzbékistan, un laboratoire similaire a été ouvert en 2021.

Les États-Unis ont positionné ces installations comme visant à lutter contre le bioterrorisme et à répondre de manière adéquate aux menaces naturelles. L'Asie centrale est un réservoir naturel pour un certain nombre de maladies dangereuses, notamment la peste.

Cependant, au cours de l'opération spéciale en Ukraine, les autorités russes ont déclaré à plusieurs reprises que ces installations auraient pu être utilisées pour créer des armes biologiques. Moscou a une attitude négative à l'égard du placement près de ses frontières de biolaboratoires américains liés à l'Agence américaine de réduction de la menace bioterroriste (DTRA) dirigée par le Pentagone.

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Propager la démocratie

Lors de son séjour au Kazakhstan, M. Blinken a déclaré que les États-Unis soutenaient les réformes du système politique du pays vers une plus grande "démocratie". En Ouzbékistan, il a également été question de "réformes". Le ministère ouzbek des Affaires étrangères a exprimé sa reconnaissance pour le soutien américain aux réformes du président Mirziyoyev. Au cours de sa tournée en Asie centrale, M. Blinken a accordé une attention particulière aux programmes humanitaires américains dans la région. A Tachkent, par exemple, il a rencontré des écoliers participant au programme "US Embassy Access".

Hisser les drapeaux

La visite du secrétaire d'État américain en Asie centrale a coïncidé avec la visite du secrétaire du Conseil de sécurité russe, Nikolay Patrushev, au Venezuela et à Cuba. Au Venezuela, Patrushev a rencontré le dirigeant du pays, Nicolas Maduro, et a discuté officiellement de la coopération entre les services de renseignement et les forces de l'ordre. À Cuba, une réunion a eu lieu avec le chef du ministère de l'Intérieur du pays, ainsi qu'avec le leader de la révolution cubaine, Raul Castro, et le président du pays, Miguel Diaz-Canel. Les "priorités stratégiques" de la coopération entre les deux pays ont été discutées.

Les États-Unis et la Russie hissent leur drapeau dans les domaines d'intérêt prioritaires de chacun. Ce faisant, Moscou peut compter sur ses alliés dans la région, tandis que Washington doit trouver des échappatoires pour convaincre les partenaires de Moscou d'écouter sa position. Cependant, les États-Unis disposent d'un potentiel de déstabilisation de la région, notamment des biolaboratoires non responsables devant les autorités locales, des institutions et fondations de la "société civile" et des instruments de pression des sanctions. Dans le cadre des "consultations" avec les Américains sur les sanctions, les États d'Asie centrale leur donnent de facto le droit d'influencer leurs propres économies, sapant ainsi leur propre souveraineté.

 

samedi, 25 février 2023

La Chine, l'Iran et le mouvement contre l'hégémonie occidentale

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La Chine, l'Iran et le mouvement contre l'hégémonie occidentale

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2023/02/15/kiina-iran-ja-lannen-h...

Le président iranien Ebrahim Raisi effectue actuellement une visite d'État de trois jours en Chine, à l'invitation du président Xi Jinping. Au cours de ce voyage, un certain nombre de documents de coopération seront signés afin d'approfondir et d'élargir le partenariat stratégique entre les deux pays, l'"alliance du lion et du dragon".

Lors du sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai qui s'est tenu l'année dernière à Samarkand, en Ouzbékistan, le président Xi a mentionné que la Chine envisagerait les relations Chine-Iran dans une "perspective stratégique et à long terme". Le gouvernement iranien a également déclaré que la visite de M. Raisi en Chine avait une "signification économique, politique et stratégique".

En tant que deux anciennes civilisations d'Asie, la Chine et l'Iran sont aujourd'hui des puissances industrielles et des producteurs d'énergie majeurs. Les deux pays se complètent économiquement et ont tous deux un fort désir de se développer; leurs besoins de développement sont compatibles dans de nombreux domaines.

La Chine est le premier partenaire commercial de l'Iran depuis de nombreuses années et l'Iran est l'un des marchés les plus importants pour les contrats de projets étrangers chinois, ainsi que pour l'exportation d'équipements complets et de modules technologiques. Dans le même temps, l'Iran est un pays important dans le processus de développement de l'initiative chinoise "Belt and Road Infrastructure".

La Chine et l'Iran sont également tous deux des adversaires de l'hégémonie anglo-américaine. L'Iran reste la cible de sanctions sévères, tandis que la Chine est la principale cible de la "répression stratégique" de l'Occident. Malgré ces revers, il y a de la place et du potentiel pour l'essor de pays comme la Chine et l'Iran en dehors du bloc occidental américain et de sa sphère d'influence.

L'interaction croissante entre la Chine et l'Iran présente également des caractéristiques qui vont à l'encontre de l'hégémonie occidentale. Pékin et Téhéran prônent une politique étrangère indépendante et défendent fermement le principe de non-ingérence des étrangers dans leurs affaires intérieures. La souveraineté dans le contexte international s'inscrit dans la tendance générale de l'époque et contribue au pluralisme mondial.

La Chine estime que le monde est actuellement en proie à des changements jamais vus depuis un siècle. En raison des actions de Washington, la structure internationale est de plus en plus divisée et changeante. Sans aucun doute, le plus grand défi pour l'avenir proche est de vaincre le modèle capitaliste de l'Occident et les politiques à courte vue basées sur la pensée à somme nulle.

Dans la situation actuelle, les pays émergents sont une fois de plus confrontés à des choix historiques. Pendant la guerre froide, de nombreux pays ont refusé de se joindre à la confrontation du bloc et ont créé le Mouvement des non-alignés afin de poursuivre un statut indépendant et souverain.

Il s'agit d'une force politique dominante qui est délibérément ignorée par les États-Unis et l'opinion publique occidentale ; deux tiers des membres de l'ONU - plus de la moitié de la population mondiale - vivent dans des pays non alignés. La Chine est le partenaire naturel de ces pays, qui ont partagé leur sort avec les pays en développement.

Par ses actions actuelles, la Chine cherche à contribuer à l'émergence d'un nouveau système de gouvernance mondiale, plus rationnel et peut-être plus équitable. Il semblerait qu'il y ait également de la place pour la République islamique d'Iran et de nombreux autres pays qui ont subi des épreuves aux mains de l'Occident.

La "bi-mondialisation" en marche - vers une nouvelle guerre froide?

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La "bi-mondialisation" en marche - vers une nouvelle guerre froide?

Peter Logghe

Source: Nieuwsbrief Deltapers, nr. 177, februari 2023

Le monde est de plus en plus divisé et les lignes de fracture passent cette fois-ci par les câbles de communication sous-marins, les serveurs de données et les usines de semi-conducteurs. La mondialisation, selon l'auteur Guillaume Travers, qui écrit désormais dans la revue Eléments (en l'occurrence dans son 200ème numéro), ne s'arrête pas, mais émerge en tant que bi-mondialisation, le monde globalisé tombant dans l'un des deux camps: l'américain ou le chinois. La position de l'Europe est faible. Guillaume Travers esquisse les défis stratégiques de demain dans sa contribution sur "la guerre des infrastructures".

Non sans raison, Travers cite l'exemple du système bancaire SWIFT, lancé en 1973, afin de suivre de manière fiable les comptes entre banques. Développé en Belgique, dans le seul but de ne dépendre d'aucune des grandes puissances de l'époque, SWIFT voulait ainsi créer un système neutre et apolitique pour faciliter les paiements internationaux. Le même raisonnement - faciliter le trafic international et le faire par le biais d'un intermédiaire neutre et apolitique - peut être fait en ce qui concerne l'internet, entre autres.

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Cet idéal de neutralité dans les infrastructures est en train de disparaître comme neige au soleil, écrit Travers. Au départ, les États-Unis ont espionné les données de SWIFT à la suite des attentats islamistes du 11 septembre 2001. Le ministère de la Justice belge a renoncé aux poursuites. En 2010, la situation a été "régularisée" et les États-Unis ont officiellement eu accès aux données de paiement. La neutralité avait, d'un coup, été supprimée, SWIFT n'avait plus de monopole "neutre" et était considéré comme une "infrastructure américaine".

Une "guerre des infrastructures" s'est engagée, un certain nombre de puissances politiques s'opposent à la domination américaine sur l'infrastructure mondiale et, par suite, développent la leur propre. Pourtant, une seule superpuissance parvient actuellement à proposer une alternative réelle et exploitable, la superpuissance chinoise. Pour Pékin, le développement massif de toutes sortes d'infrastructures pour rompre avec la dépendance à l'égard des États-Unis est un moment clé dans l'établissement d'un nouvel ordre mondial. Pour la Chine, ce développement des infrastructures est complémentaire de son initiative géopolitique "Belt and Road Initiatives" de 2013. La volonté de devenir technologiquement autonome est forte en Chine.

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En ce qui concerne les paiements internationaux, explique Guillaume Travers, la Chine a lancé son propre système, le China International Payments System (CIPS), en 2015. Le CIPS relie aujourd'hui environ 1300 banques dans 107 pays. Pas comparable à SWIFT, autrement dit, mais le CIPS gagne en volume chaque année et permet ainsi à la monnaie renminbi de circuler hors de Chine. La création du CIPS s'est accompagnée du développement de plusieurs réformes pour faciliter l'utilisation du renminbi au niveau international.

En informatique, on assiste au même scénario. En mai 2022, le gouvernement chinois a annoncé son intention de remplacer l'ensemble du parc informatique de l'État et des entreprises. Tous les ordinateurs de fabrication étrangère seront remplacés par des modèles et des ordinateurs chinois, soit un total de 30 millions d'ordinateurs. Cette politique et d'autres sont toutes le résultat d'une politique chinoise de réduction de la dépendance envers les pays étrangers (et surtout l'Amérique ) dans les semi-conducteurs, la téléphonie, les serveurs et les données. Dans le même temps, la Chine renforce le contrôle de sa propre production.

L'Amérique réagit à la politique chinoise

Pendant ce temps, de nombreuses grandes entreprises chinoises se sont retirées de la Bourse de New York, empêchant les autorités américaines de glaner des informations délicates sur les entreprises. Les États-Unis réagissent naturellement à ce changement de politique chinoise de bien des manières. Depuis le 25 novembre 2022, l'Amérique refuse aux entreprises de télécommunications chinoises des licences pour le marché américain. Les entreprises en question sont Huawei et ZTE. En ce qui concerne les semi-conducteurs, l'Amérique doit faire face à une concurrence chinoise acharnée. En août 2022, les États-Unis ont adopté la loi CHIPS and Science Act, annonçant que 280 milliards d'euros d'investissements sont prévus pour la fabrication et l'innovation sur le marché des semi-conducteurs et des puces.

DERNIER-VOL_couv.jpgAlice Ekman, spécialiste de la Chine, parle de "bi-mondialisation" dans un livre récent (Dernier vol pour Pékin, L'Observatoire, 240 p.). Car ce qui se profile n'est pas seulement la (vieille) confrontation entre deux superpuissances, l'Amérique et la Chine, mais plus encore la division de la planète en deux zones d'influence. La zone d'influence chinoise est, elle, en pleine expansion. Les initiatives "Belt and Road", déjà mentionnées, visent à relier la Chine à l'Europe, et sont donc désormais associées à des investissements massifs dans les infrastructures. L'Europe reste sous l'influence des États-Unis et montre jusqu'à présent peu de signes de vouloir s'éloigner de la dépendance technologique.

Le Japon abandonne sa politique de neutralité militaire

Pour l'Amérique, la politique étrangère et géopolitique se jouera principalement dans le Pacifique au cours des prochaines années - malgré la focalisation temporaire sur l'Ukraine et l'incursion russe. Il est clair que la partie de poker autour de Taïwan a accru la nervosité des États-Unis. Le Japon, qui a dû payer un lourd tribut en tant que puissance perdante après la Seconde Guerre mondiale, et a dû limiter sa politique militaire à un usage purement défensif, semble changer son fusil d'épaule. Dans l'ombre du Premier ministre japonais assassiné Shinzo Abe, le Japon semble mettre un terme à sa politique pacifiste et opter pour une politique militaire plus musclée.

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En raison de sa situation géographique unique, le Japon pourrait et peut continuer à jouer un rôle décisif dans de nombreux conflits. Le Japon est toujours à la tête de la troisième plus grande économie du monde et, ces dernières années - sous la direction du Premier ministre Abe, soit dit en passant -, il a augmenté ses dépenses militaires. Mais les commentateurs ne parlent pas d'une rupture révolutionnaire avec le pacifisme, qui a défini pendant des années la politique étrangère du Japon, mais d'un ajustement aux nouvelles circonstances. Le fait est que le nouveau Premier ministre japonais, Fumio Kishida, veut augmenter les dépenses dans le domaine militaire et aussi améliorer sérieusement la capacité des dispositifs contre-attaquants du Japon. Le Premier ministre Kishida veut porter les dépenses militaires, qui représentaient jusqu'à présent 1 % du PIB, à 2 % en cinq ans. Quant à la reconstitution des réserves militaires en vue de riposter militairement, il s'agit, selon Kishida, d'un processus qui prendra du temps. Par exemple, la constitution d'un stock de nouveaux missiles (Tomahawk et autres) risque de prendre des années.

De nombreux commentateurs voient donc la visite de Fumio Kishida à Washington fin janvier 2023 comme un nouveau départ, et un changement significatif dans l'alliance nippo-américaine. Le Japon et l'Amérique se préparent à l'éventualité d'un conflit militaire dans le Pacifique pour la première fois depuis des décennies. Alors que l'attention des États-Unis et du Japon pendant la première guerre froide était principalement concentrée sur le nord (la menace de l'URSS), l'attention se porte désormais sur le sud et les îles japonaises du sud-ouest, une région géographique située à 100 miles à peine des côtes taïwanaises.

D'un point de vue géopolitique, beaucoup de choses bougent dans le Pacifique, mais peu d'entre elles parviennent malheureusement à notre "presse de qualité" en Flandre.

jeudi, 23 février 2023

La politique étrangère allemande en Asie

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La politique étrangère allemande en Asie

Source: https://katehon.com/ru/article/vneshnyaya-politika-germanii-v-azii

Délocalisation de la production et nouveaux défis économiques

La région d'Asie centrale est l'une des priorités de la politique étrangère allemande. Son intérêt particulier pour cette région est de nature stratégique et, à long terme, il se déploie principalement en raison des intérêts économiques allemands. En particulier depuis le début de l'opération militaire spéciale en Ukraine, un nouveau cycle de coopération bilatérale et multilatérale entre l'Allemagne et la région a pris forme. Le journal français Le Monde Diplomatique (MD) rapporte que de nombreuses entreprises allemandes envisagent de délocaliser leur production en Afrique et en Asie en raison de l'impact croissant des sanctions anti-russes sur l'économie européenne.

Les sanctions de l'UE contre la Russie ont gravement endommagé l'économie européenne, et la crise énergétique qui en résulte a affecté les secteurs les plus importants de l'économie. Avant les sanctions contre la Russie, l'Allemagne recevait la plupart de ses ressources énergétiques à bas prix de la Russie, mais la perte de ce fournisseur a eu un impact majeur sur l'économie du pays. Par conséquent, de nombreuses grandes entreprises allemandes ont déjà exprimé le souhait de déplacer leur production vers l'Asie centrale et du Sud-Est, ainsi que vers les pays du Maghreb.

Plusieurs entreprises chimiques sont déjà en train d'arrêter leur production en Allemagne et de délocaliser leurs installations à l'étranger en raison des coûts élevés des matières premières et de l'électricité.

La production chimique en Allemagne a chuté de 14 % au cours du seul troisième trimestre 2022, et de nombreuses petites et moyennes entreprises ont eu des difficultés à payer leurs factures d'électricité et de gaz. De son côté, Die Welt évoque une possible pénurie de viande en Allemagne dans les mois à venir en raison de la fermeture massive de sites de production. Les représentants de l'industrie allemande de la viande mettent en garde contre de possibles problèmes d'approvisionnement en viande, notamment en porc.

La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, s'est également rendue à Astana et à Tachkent fin octobre 2022 pour des entretiens sur l'élargissement de la coopération économique avec le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. L'Allemagne considère l'Asie centrale comme un site potentiel pour la relocalisation de ses installations de production. Le processus de délocalisation des usines de production allemandes a déjà commencé, et plus de 300 entreprises ont été préparées à cette délocalisation.

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Les intérêts allemands au Kazakhstan et en Ouzbékistan

La visite du 31 octobre de la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock dans la région d'Asie centrale s'est concentrée sur les véritables défis politiques et économiques. Elle s'est entretenue avec son homologue kazakh Mukhtar Tleuberdi et le Premier ministre Alikhan Smailov à Astana, où ils ont discuté de l'élargissement de la coopération économique entre l'Allemagne et le Kazakhstan, notamment des orientations en matière d'énergie et d'industrie. L'UE considère le Kazakhstan et l'Ouzbékistan comme des sites potentiels pour le transfert de sa production, notamment de biens de consommation.

Le but de la visite de M. Baerbock était de fixer la position de l'UE vis-à-vis des pays d'Asie centrale, en particulier le Kazakhstan et l'Ouzbékistan.

Mme Baerbock a également noté la position claire du Kazakhstan dans la situation géopolitique difficile d'aujourd'hui. Elle a exprimé son soutien au Kazakhstan sur "ce chemin long et difficile" et a promis de nouveaux projets dans les domaines de la numérisation, de l'énergie et des transports. Elle a souligné que la coopération entre l'Allemagne et le Kazakhstan devait être basée sur un partenariat. Annalena Baerbock n'est pas venue au Kazakhstan seule, mais avec une délégation d'hommes d'affaires et de spécialistes dans le domaine de l'énergie et des infrastructures.

La coopération entre l'UE et le Kazakhstan se déroulera dans le cadre du programme "matières premières contre technologie". Les discussions à Astana ont porté sur l'approvisionnement en métaux de terres rares, qui sont essentiels à la nouvelle économie technologique de l'Allemagne et de l'UE dans son ensemble. Aujourd'hui, le principal fournisseur de ces métaux est la Chine, et la dépendance vis-à-vis de ce pays est devenue critique pour l'UE. Le Kazakhstan pourrait devenir un fournisseur alternatif, mais le développement des gisements kazakhs nécessite une structure et une technologie de pointe que l'Allemagne est prête à fournir.

L'UE considère le Kazakhstan et l'Ouzbékistan comme des sites potentiels pour sa propre production, notamment de biens de consommation. Les avantages de la coopération avec l'Ouzbékistan pour l'Allemagne comprennent l'accès à une main-d'œuvre bon marché, la disponibilité de matières premières locales et la proximité des marchés de consommation, y compris les marchés en expansion d'Asie centrale, d'Iran, d'Irak et d'Afghanistan. L'Azerbaïdjan et l'Ouzbékistan sont également très importants et significatifs dans l'espace post-soviétique en raison de leur démographie croissante, de leurs économies en expansion et de leurs futurs programmes d'industrialisation. Les entreprises allemandes sont déjà impliquées dans des projets d'infrastructure et sont prêtes à fournir leur technologie et leurs équipes de gestion pour diriger des entreprises en Ouzbékistan et au Kazakhstan. Enfin, une décision commune a été prise à Astana pour ouvrir un bureau de "diplomatie de l'hydrogène" afin de réduire les émissions dans l'industrie et les transports.

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L'Allemagne et la Chine : de la coopération à la concurrence

Outre la délocalisation de la production allemande en Asie, l'Allemagne tente de développer des relations bilatérales avec la République populaire de Chine. Début novembre 2022, le chancelier allemand Olaf Scholz s'est rendu en Chine avec les dirigeants de grandes entreprises allemandes telles que Siemens, BMW, BASF, Volkswagen, BioNTech, Adidas, Bayer, Merck, GeoClimaDesign, Wacker et Deutsche Bank. Olaf Scholz n'a passé que 11 heures en Chine et s'est concentré sur les questions économiques ainsi que sur la question de l'Ukraine, en essayant de convaincre la Chine de se joindre à la politique de sanctions de l'UE contre la Russie.

Il convient de noter que Xi Jinping maintient une position neutre dans ce conflit, la Russie étant un partenaire stratégique important de la Chine. De nombreux habitants de l'Allemagne pensent que le voyage de la chancelière allemande en République populaire de Chine est une tentative de rétablir l'économie allemande après avoir perdu la Russie comme fournisseur de ressources énergétiques bon marché. Dans le même temps, les actions du chancelier ont été fortement critiquées par les Allemands, qui craignent la dépendance croissante de l'Allemagne vis-à-vis de la Chine et son impact sur le développement futur du pays.

Lorsque l'on examine la politique étrangère de l'Allemagne à l'égard de la Chine, il est important de mentionner que, selon la ministre allemande des affaires étrangères Annalena Baerbock, la Chine est l'alliée de l'Allemagne d'un côté et un concurrent de l'autre. Selon les experts, l'Allemagne et l'UE tentent généralement de développer leurs relations avec la Chine dans la sphère économique, mais maintiennent une certaine distance sur les questions politiques telles que les droits de l'homme, la liberté d'expression et autres. Récemment, cependant, les tensions entre la Chine et les pays occidentaux, y compris l'Allemagne, se sont accrues en raison de l'attitude de la Chine à l'égard de l'opération militaire spéciale de la Russie et des nouveaux problèmes de droits de l'homme dans certaines provinces chinoises.

Fin octobre 2022, il a été officiellement annoncé que l'Allemagne traversait une crise profonde, une déclaration faite par le président allemand Steinmeier lui-même. L'inflation annuelle a atteint un niveau record de 10,4 %. Six mois plus tôt, au début du printemps, les médias allemands s'inquiétaient déjà des expéditions de GNL et du besoin de matières premières en provenance de Chine pour produire des voitures et autres équipements allemands.

En mars, les rédacteurs du Handelsblatt étaient surtout préoccupés par l'Opération militaire spéciale en Ukraine, car la Chine, premier producteur et exportateur mondial de ressources naturelles avec un chiffre d'affaires de 23.000 milliards de dollars, pourrait utiliser son influence sur l'accès aux matières premières comme levier politique.

À la mi-octobre, les autorités chinoises ont ordonné aux principales sociétés d'État de cesser d'exporter du GNL vers l'Europe. Bloomberg a rapporté que cela pourrait encore exacerber la crise énergétique de l'Europe, la Chine interrompant ses approvisionnements pour répondre à ses propres besoins hivernaux. Selon Bloomberg, les problèmes d'énergie et de désindustrialisation de l'Allemagne sont devenus encore plus évidents. Les États-Unis, qui étaient auparavant dans une impasse économique avec l'UE, devancent l'Allemagne en termes de PIB de 72 milliards de dollars et creusent rapidement l'écart.

Ces problèmes obligent les principaux économistes européens à se tourner vers les partenaires asiatiques pour trouver une solution, car la guerre déclenchée par les Anglo-Saxons en Ukraine a accru les problèmes de l'Allemagne. Dans un avenir proche, la RFA cherchera par tous les moyens à renforcer ses relations avec les pays d'Asie centrale afin de reconstruire son économie.

lundi, 20 février 2023

L'Iran en passe de devenir une puissance régionale

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L'Iran en passe de devenir une puissance régionale

Par Alexander Markovics

L'État théocratique iranien : mythe et réalité

Dans les médias occidentaux, c'est une image sombre de l'Iran qui domine: manifestations de masse contre le port du voile, combats entre manifestants anarchistes et police des mœurs, exécutions en masses. Selon le récit occidental, chaque Iranien est, au fond de lui-même, un Occidental qui n'attend que d'être "libéré" par les ONG de George Soros et par l'OTAN. 44 ans après la naissance de la République islamique d'Iran, l'État théocratique serait sur le point de disparaître. Mais la réalité est tout autre, comme l'a récemment rapporté le politologue russe Leonid Savin: même dans le centre de Téhéran, il a pu voir à la fin de l'année dernière des femmes sans foulard se promener sans être inquiétées dans les rues, les cafés, les musées, les bazars et les parcs de la capitale. Leurs cheveux sont noirs, blonds, mais aussi teints en bleu. Certaines portent même des piercings et des tatouages. Il n'y a qu'à la mosquée que les fidèles de sexe féminin doivent porter le foulard. "Laissez les gens chercher leur propre chemin vers le ciel ! Nous ne pouvons pas les faire monter au ciel par la force du fouet": ces mots de l'ancien président Hassan Rouhani, qui a régné de 2013 à 2021, semblent décrire la relation actuelle entre l'État et la religion en Iran. Certes, la religion est au-dessus de la politique qui impose son autorité, mais l'islam chiite n'est pas imposé aux gens par la force nue.

L'Iran en tant que facteur de puissance dans la lutte contre l'EI et l'Arabie saoudite et en tant que producteur de menaces

En dehors de la question des femmes, qui intéresse beaucoup l'Occident, l'Iran a surtout fait parler de lui ces dernières années sur le plan géopolitique: depuis que les Etats-Unis ont détruit l'Irak de Saddam Hussein en 2003, l'influence de l'Iran dans la région s'est considérablement accrue. Avec l'aide de Téhéran, l'"axe de la résistance" a d'abord été mis en place en Irak, au Liban et en Palestine, où les milices chiites ont été formées par les troupes d'élite et l'armée politique iranienne des Gardiens de la révolution. L'Iran a progressivement étendu son influence dans ce que l'on appelle le "croissant chiite", ce qui a également déplu à son ennemi juré, Israël. Les succès ne se sont pas fait attendre: en 2006, le Hezbollah a réussi à stopper l'armée israélienne au Sud-Liban et à infliger des pertes au corps blindé israélien.

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Lorsque la guerre a éclaté en Syrie en 2011, Téhéran s'est allié à Moscou en 2015, alors que la survie d'Assad était sur le fil du rasoir, et a commencé à combattre activement l'EI dans le cadre de nombreuses offensives terrestres dans la région, tandis que les Gardiens de la révolution iraniens étaient soutenus par l'armée de l'air russe. L'Iran est également intervenu dans la guerre civile yéménite, où les Houthis chiites combattent le gouvernement dirigé par l'Arabie saoudite. En 2019, le parti qu'il soutient a réussi une frappe spectaculaire avec des drones contre des installations pétrolières au cœur de l'Arabie saoudite, loin de la ligne de front. Les militaires observateurs ont immédiatement soupçonné l'Iran, connu pour former les milices qu'il soutient à la guerre des drones.

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Derrière nombre de ces développements se trouvait le général Quassem Soleimani, chef des Gardiens de la révolution, qui était finalement si détesté par les élites américaines que Donald Trump l'a fait assassiner le 03.01.2020. Depuis lors, Soleimani a été vénéré comme un héros par la résistance anti-mondialiste dans le monde entier. Mais cela n'a pas arrêté l'Iran dans sa lutte contre la mondialisation. Depuis que des drones kamikazes Shaed-136 copiés par Moscou ont foncé sur des canons et des obusiers blindés occidentaux sur les champs de bataille ukrainiens, l'Iran est devenu une puissance militaire redoutée au niveau international. L'Iran, quant à lui, souhaite désormais renforcer sa marine en Russie et y faire construire des navires. Mais les Iraniens ne se contentent pas de se battre, ils ont également été capables d'assurer la sécurité économique de leur révolution.

L'aspect économique de la révolution

Malgré les sanctions occidentales, l'Iran a réussi à construire une économie respectable, basée sur l'autarcie. Le leitmotiv de l'économie iranienne est moquavemati - résistance. Selon lui, l'unité sociale du pays et la prise en charge des pauvres sont les priorités de l'économie - les niveaux local, régional et national n'interviennent qu'ensuite, l'économie mondiale globalisée ne venant qu'en dernier lieu. L'aviation civile compte plus de 175 avions et le pays est aujourd'hui l'un des 10 plus grands producteurs d'acier au monde, apprécié non seulement pour son pétrole, mais aussi pour d'autres ressources minérales et naturelles. Ses principaux partenaires commerciaux sont la Chine (30% du volume du commerce extérieur), mais le commerce avec l'Afrique est également en forte croissance. L'Iran fait également du commerce avec les Etats-Unis, mais il s'agit d'un marché négligeable. Alors que sous Rouhani, l'Iran était très soucieux d'un dégel avec l'Occident, Ebrahim Raisi, un adversaire résolu des États-Unis, est revenu au pouvoir en août 2021.

Par conséquent, l'intérêt de l'Iran pour un nouvel accord nucléaire - les Etats-Unis ont dénoncé unilatéralement le dernier accord conclu sous Trump - et pour la fin des sanctions de l'Occident, dont l'économie est de plus en plus insignifiante, est faible. Les Iraniens se tournent plutôt vers l'Est, en direction de l'Eurasie : un accord de libre-échange couvrant plus de 7500 biens a été conclu fin 2022. Pour relier la Russie, l'Iran et l'Inde, il est prévu de construire une voie ferrée supplémentaire pour le corridor de transport nord-sud, ainsi qu'un canal reliant la mer Caspienne au golfe Persique. Comme nous pouvons le constater, il faut compter avec l'Iran dans notre monde de plus en plus multipolaire - en tout cas comme puissance régionale, voire comme pôle de puissance à part entière.

Azerbaïdjan-Iran: nouveau problème

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Azerbaïdjan-Iran: nouveau problème

Source: https://katehon.com/ru/article/azerbaydzhan-iran-novaya-problema

Qui profite de l'escalade du conflit entre les deux pays ?

Le 27 janvier 2023, vers 08h30 heure locale, un homme armé d'une Kalachnikov AK-47 a attaqué l'ambassade d'Azerbaïdjan en Iran. En franchissant le poste de garde, l'agresseur a tué Orkhan Rizvanoglu Askerov, le chef de la sécurité de l'ambassade, et a blessé deux autres gardes qui tentaient d'empêcher l'attaque. Le personnel de l'ambassade a réussi à désarmer l'auteur de l'attaque.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a condamné l'attaque armée, la décrivant comme une attaque terroriste et exigeant une enquête immédiate et la punition des auteurs. Le 29 janvier, le personnel de l'ambassade à Téhéran et les membres de leurs familles - 53 au total - ont été évacués vers Bakou. Le vice-ministre des Affaires étrangères, Khalaf Khalafov, a déclaré aux journalistes que l'ambassade avait complètement suspendu ses activités diplomatiques, mais que le consulat général de Tabriz continuait à fonctionner normalement.

Le ministère des affaires étrangères du pays a déclaré que la police n'a pas réagi, même lorsque l'assaillant a commencé à crier des menaces aux diplomates azerbaïdjanais, disant qu'il allait tous les tuer.

Le fait que le terroriste ait choisi le vendredi, qui est considéré comme un jour de congé en Iran, portait une arme automatique et des chargeurs complets, des cocktails Molotov, un objet lourd et contondant pour frapper, ainsi que la non-intervention de la police iranienne suggèrent que l'attaque était pré-planifiée.

Il est à noter que les caméras de surveillance de l'ambassade ont capturé en détail le moment de l'attaque. En particulier, les séquences vidéo montrent que l'attaquant est passé en voiture devant l'ambassade à deux reprises à 19 minutes d'intervalle pour choisir un moment opportun avant de commettre son crime. Selon le ministère des Affaires étrangères, malgré le fait que "le terroriste a forcé l'entrée du bâtiment de l'ambassade et que le son des coups de feu pouvait être entendu sans cesse de là, l'officier de police iranien qui était posté devant l'entrée non seulement n'est pas intervenu, mais a quitté son poste". De plus, note le rapport, l'assaillant a tiré sur les fenêtres des appartements du bâtiment de l'ambassade où vivent des familles de diplomates azerbaïdjanais. Dans le même temps, la police ne s'est pas précipitée pour arrêter le terroriste, a commencé à lui parler et a pris une position d'observation.

L'incident confirme une fois de plus l'importance d'assurer la sécurité des missions diplomatiques par les autorités de l'État hôte, conformément à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961.

Certaines sources pensent que le régime au pouvoir en Iran est derrière l'attaque de l'ambassade d'Azerbaïdjan en Iran. C'est ce qu'a déclaré Michael Doran, expert américain et senior fellow au Hudson Institute, selon Report. "La règle générale est que les attaques contre les ambassades en Iran ne se produisent pas à moins que le régime ne le veuille", a-t-il déclaré.

Ce n'est pas la première attaque contre une mission azerbaïdjanaise. Il y a déjà eu une attaque contre la représentation azerbaïdjanaise à Londres par un représentant d'une organisation pro-iranienne. Les relations ont été particulièrement tendues à la fin de l'année dernière. Les deux pays effectuent des manœuvres militaires près de leurs frontières respectives et font des déclarations très dures. Par exemple, les représentants de Téhéran affirment que l'Azerbaïdjan héberge sur son territoire ceux qui s'opposent aux autorités iraniennes. Une telle déclaration a été faite par un général iranien de l'IRGC en octobre dernier lors d'exercices militaires à la frontière avec l'Azerbaïdjan. À cette occasion, le président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, a critiqué très sévèrement l'Iran en novembre 2022. Il a promis de protéger le mode de vie laïc des Azerbaïdjanais, y compris ceux qui vivent en Iran. En général, les questions concernant le dit "Azerbaïdjan du Sud" se retrouvent souvent dans les médias azerbaïdjanais. Étant donné la situation difficile actuelle avec les protestations en Iran, il s'agit d'une question très douloureuse et sensible pour ce pays.

Un coup dur pour les usines en Iran

Peu après, dans la nuit du 29 janvier, les médias arabes ont parlé d'un incendie dans une usine de défense à Ispahan : selon leurs informations, elle produit des munitions. Un peu plus tard, l'autorité militaire de la République islamique d'Iran a affirmé que l'incendie avait été provoqué par une attaque de drone dans la soirée du 28 janvier 2023 vers 23h30. L'attaque, selon les militaires iraniens, n'a pas atteint ses objectifs : l'un des drones a été abattu par la défense aérienne, les deux autres sont tombés dans des pièges défensifs et ont explosé. L'attaque n'a fait aucune victime et peu de dégâts, les équipements sont restés intacts et la production continue. Parallèlement, les médias ont rapporté une explosion dans une base aérienne de la ville de Dizful, ainsi que des explosions et des incendies dans les villes de Hamadan et Resht.

Il convient de noter que les responsables iraniens ont à peine commenté les explosions à Ispahan - la plupart des informations ont été publiées par les médias, citant leurs propres sources. Le Wall Street Journal a écrit qu'Israël était derrière l'attaque, qui, avec les États-Unis, développe de nouveaux moyens d'affronter l'Iran. Les chaînes de télévision arabes Al Arabiya et Al Hadath ont rapporté que l'armée américaine était impliquée dans l'attaque - cette dernière a affirmé que les États-Unis avertissaient ainsi Téhéran et Moscou qu'il était interdit de monter des usines d'armement et d'exporter des armes balistiques. Le journal israélien The Jerusalem Post, citant des sources des services de renseignement occidentaux, a rapporté que, contrairement aux affirmations des autorités iraniennes, l'opération a été un "énorme succès" et que les dégâts étaient bien plus importants que les "dommages mineurs au toit" revendiqués par le bureau militaire de la République islamique d'Iran.

Le porte-parole du Pentagone, Patrick Ryder, a déclaré que l'armée américaine n'était pas impliquée dans les frappes, et le ministère israélien des Affaires étrangères a refusé de commenter le sujet.

Le ministère iranien des Affaires étrangères a officiellement déclaré que l'attaque contre les installations du ministère de la Défense n'affecterait pas les plans de Téhéran pour développer son industrie nucléaire. "Pour affaiblir la sécurité de l'Iran, des mesures lâches ont été prises qui n'affecteront pas la volonté et les intentions de nos experts concernant le développement de l'atome pacifique", a déclaré le chef du ministère des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian.

L'implication des Etats-Unis

Selon le groupe de recherche Iran Watch basé à Washington, Shahed Aviation Industries, qui fabrique les drones Shahed, est basé à Ispahan. En 2022, l'Union européenne, les États-Unis, le Royaume-Uni et quelques autres pays occidentaux ont imposé des sanctions à Shahed Aviation Industries parce que la société était impliquée dans la fourniture de ses produits à la Russie.

Moscou et Téhéran ont démenti à plusieurs reprises les affirmations selon lesquelles la Russie aurait utilisé des drones iraniens pour une utilisation en Ukraine. Le porte-parole de la présidence russe, Dmitriy Peskov, a qualifié de tels rapports d'inepties et a souligné que l'armée russe utilise des drones produits localement. Début novembre, le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir Abdollahian a déclaré que la République islamique avait fourni des drones à la Russie, mais en petit nombre et quelques mois avant le début de l'opération militaire en Ukraine.

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L'implication d'Israël

L'attaque a coïncidé avec les déclarations des autorités israéliennes sur l'urgence d'intervenir pour empêcher la République islamique d'Iran d'obtenir des armes nucléaires, et suite au mécontentement occidental concernant les livraisons d'armes iraniennes à l'armée russe. Au moment de l'attaque, curieusement, le directeur de la CIA William Burns se trouvait en Israël pour discuter avec le directeur du Mossad David Barnea sur les méthodes de lutte contre l'Iran. En outre, du 23 au 26 janvier, les États-Unis et Israël ont mené le plus grand exercice militaire conjoint jamais réalisé sous le nom de code Juniper Oak 23.2.

Considérant l'existence d'armes atomiques dans les régimes autoritaires comme une menace directe pour lui-même, Israël a frappé à plusieurs reprises des installations nucléaires sur leurs territoires. Les Israéliens estiment que la possession d'armes de destruction massive augmente la probabilité d'une attaque contre leur pays. Et contrer un tel développement est devenu un élément essentiel de la politique de défense israélienne. L'histoire montre que les deux fois précédentes, ils avaient raison - les frappes sur les réacteurs nucléaires de l'Irak et de la Syrie n'ont pas conduit à des guerres, mais elles ont privé les dirigeants de ces pays de toute chance d'obtenir une bombe nucléaire.

Les autorités israéliennes avaient précédemment prévenu qu'elles mèneraient une action militaire si les efforts diplomatiques échouaient à freiner le programme nucléaire de l'Iran.

La veille, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a publié une déclaration en rapport avec les attaques terroristes à Jérusalem. Il a promis une réponse "forte, rapide et précise" aux attaques. "Ce soir, nous avons décidé d'attaquer les organisations terroristes. Notre réponse sera forte, rapide et précise. Quiconque veut nous faire du mal, nous lui ferons du mal", a déclaré le Premier ministre.

Néanmoins, il n'y a eu jusqu'à présent aucun rapport officiel de Téhéran ou des autorités israéliennes sur l'implication d'Israël dans les attaques contre des installations en Iran.

Les relations Azerbaïdjan-Iran

Les deux événements ont très peu à voir l'un avec l'autre. Malgré le fait que les relations soient instables, elles visent à la coopération. Il existe une interaction entre la République islamique d'Iran et la République d'Azerbaïdjan, qui se développe de manière croissante jour après jour.

Soulignant que les deux pays sont engagés dans de grands projets économiques d'importance internationale, Nasser Kanani a déclaré que l'un de ces projets était le Corridor de transport international Nord-Sud. Ce corridor relie les continents européen et asiatique par des lignes de transport. Les pays participant au projet développeront leurs liens commerciaux et travailleront aux possibilités de transit.

Selon lui, le chemin de fer Resht-Astara, qui est un élément du Corridor de transport international Nord-Sud, revêt une grande importance pour l'Azerbaïdjan et l'Iran.

Le représentant du ministère des Affaires étrangères a en outre déclaré que l'Iran considère le développement des relations avec les pays voisins, en particulier avec la République d'Azerbaïdjan, comme une priorité de sa politique étrangère. Téhéran souhaite assurer une paix et une tranquillité durables dans la région et prend des mesures dans ce sens.

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Il convient de noter que la voie ferrée Resht-Astara est une continuation de la voie ferrée Qazvin-Rasht-Astara (Iran)-Astara (Azerbaïdjan). Cette route reliera les systèmes ferroviaires de l'Iran, de l'Azerbaïdjan et de la Russie. C'est cette route qui permettra de transporter des marchandises de l'Europe et de la Russie vers l'Inde et d'autres pays d'Asie du Sud-Est. Le transport de marchandises dans le sens inverse donnera un coup de fouet aux secteurs non exportateurs de pétrole de la Russie, de l'Iran et de l'Azerbaïdjan: ces pays deviendront des plaques tournantes logistiques, générant des devises supplémentaires pour le budget.

Toutefois, l'Iran est très critique à l'égard des politiques azerbaïdjanaises. De même, l'Azerbaïdjan critique la politique iranienne. Ils ont entre eux beaucoup de contradictions non résolues.

En octobre dernier, l'Iran a mené un exercice massif à la frontière. Plus tard, l'Azerbaïdjan a effectué des exercices avec la Turquie. La rhétorique utilisée par les deux pays est très dure. Car l'Azerbaïdjan du Sud est une question très sensible pour l'Iran. Selon diverses estimations, 15 à 40 millions d'Azerbaïdjanais vivent en Iran. Au moins trois grandes provinces d'Iran sont peuplées d'Azerbaïdjanais. Dans ces manifestations de masse, qui ont lieu sur le territoire iranien, le rôle des représentants des minorités nationales, en premier lieu les Kurdes et les Azerbaïdjanais, est très important. Il s'agit donc d'un facteur qui affecte sérieusement les relations entre les deux pays.

Il convient également de noter que l'Iran a ses propres problèmes dans ses relations avec Israël et les États-Unis. L'Azerbaïdjan, au contraire, a de très bonnes relations avec Israël et reçoit des armes de ce pays.

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Questions controversées sur la Caspienne

À un moment donné, tous les États riverains de la Caspienne ont eu des problèmes liés à la division de la Caspienne. L'Azerbaïdjan extrait la plupart de ses ressources pétrolières sur le plateau de la Caspienne. Et pour pouvoir les exploiter, il lui fallait un statut juridique. Au cours des 30 dernières années, il y a eu de très forts débats sur le statut juridique de la mer Caspienne. Et l'Iran a toujours adopté une position différente de celle des États caspiens de l'ancienne Union soviétique. Mais aujourd'hui, il n'y a plus de difficultés sur cette question, car les accords entre les pays de la Caspienne en général ont été conclus.

En outre, il existe une coopération dans le corridor de Zanguezour. La région de Syunik est un haut plateau solide, plusieurs routes préparées et, en fait, ce qu'on appelle le corridor de Zanguezour : une route, qui longe juste la rivière bordant la crête (à droite la route est iranienne, à gauche - azerbaïdjanaise et arménienne).

Il a également été rapporté que Bakou signerait un protocole d'accord avec Téhéran concernant les déplacements des citoyens azerbaïdjanais vers le Nakhitchevan en utilisant le territoire iranien.

Enfin, le conflit Azerbaïdjan-Iran entraînera une intensification des relations entre Israël et l'Azerbaïdjan en matière d'armement et d'énergie. Étant donné qu'Israël est actuellement le deuxième plus grand fournisseur d'armes à l'Azerbaïdjan après la Russie, et étant donné que la Russie est également un allié de l'Iran et de l'Arménie.

Un conflit armé entre l'Iran et l'Azerbaïdjan pourrait mettre en péril les projets énergétiques régionaux. Ainsi, tout conflit s'avèrera désavantageux pour les deux pays.

La visite de Raisi à Pékin

La visite de trois jours du président iranien Ibrahim Raisi en Chine a débuté le mardi 14 février.

Dans la partie publique des entretiens, Xi Jinping et Ibrahim Raisi ont souligné la proximité des deux pays sur les questions politiques. La Chine soutient l'Iran dans la défense de la souveraineté de l'Etat, de l'indépendance, de l'intégrité territoriale et de la dignité nationale, soutient l'Iran dans son opposition aux politiques d'unilatéralisme et d'intimidation, et s'oppose aux forces extérieures qui s'immiscent dans les affaires intérieures de l'Iran et portent atteinte à la sécurité et à la stabilité du pays.

Xi Jinping a promis que la Chine continuerait à participer de manière constructive aux négociations sur le renouvellement du Plan d'action global conjoint, à soutenir les droits et intérêts légitimes de l'Iran et à promouvoir un règlement rapide de la question nucléaire. Le plan convenu en 2015 a permis à l'Iran de rompre son isolement international, mais le rejet de l'accord par le président américain Donald Trump et le rétablissement des sanctions américaines en 2018 ont déclenché une crise économique en Iran. Pékin ne peut pas à elle seule relancer le processus de négociation, mais sa voix sera également importante au sein du Conseil des gouverneurs de l'AIEA et de la plateforme du Conseil de sécurité de l'ONU, où un nouveau cycle de crise sur le programme nucléaire iranien est possible.

Lors de sa rencontre avec M. Raisi, Xi a déclaré que la stabilité au Moyen-Orient était essentielle au développement économique mondial et à la stabilité des approvisionnements énergétiques. La Chine est l'un des principaux consommateurs de pétrole iranien (les États-Unis ont imposé des sanctions à ce secteur).

Ainsi, la capacité de l'Iran à mener des relations fructueuses en matière de politique étrangère, y compris avec la Chine, peut se révéler. Ce qui peut naturellement déplaire aux États-Unis.

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Le succès de l'Iran dans l'économie autonome

Au cours des quatre dernières décennies, l'Iran a accumulé une grande expérience des sanctions et a appris à résister à leur impact.  L'économie iranienne est très diversifiée, et l'industrie manufacturière est effectivement l'un des domaines les plus importants. La fabrication représente aujourd'hui environ un cinquième de l'emploi total dans le pays. Il s'agit de voitures, de métaux et de plastiques.

Les sanctions américaines rendent difficile l'accès des entreprises iraniennes aux biens dont elles ont besoin pour fabriquer des produits et elles ont du mal à trouver des clients à l'étranger car on craint que l'administration américaine n'impose également des sanctions secondaires à toute entreprise faisant des affaires avec l'Iran.  Les Iraniens disposent toutefois d'industries alternatives sur lesquelles se rabattre et d'une capacité intérieure considérable, ainsi que de la possibilité d'utiliser leurs relations avec plusieurs États voisins pour tenter de faire face aux difficultés économiques.  Des pays comme l'Irak et l'Afghanistan, certaines républiques d'Asie centrale et bien sûr la Syrie. La pénurie de biens importés a contribué à stimuler la production nationale. Ce qui, à son tour, a permis de créer davantage d'emplois pour les Iraniens.

Entre-temps, l'économie iranienne a bénéficié de la hausse des prix des produits de base, notamment du pétrole et des produits pétroliers tels que les produits pétrochimiques.  La République islamique a également été en mesure de remplacer certains biens importés en augmentant la production nationale, ce qui, à son tour, a contribué à développer les secteurs manufacturier et minier de l'Iran.  Enfin, la levée des restrictions liées à la pandémie, associée à l'optimisme du public quant à la conclusion d'un accord avec les États-Unis pour la levée des sanctions, a contribué à la croissance du secteur des services.

Les données publiées par Téhéran montrent que l'économie a progressé de plus de 4 % au cours de l'année dernière, grâce aux prix élevés du pétrole et au contournement des sanctions américaines. Cela ne plaît évidemment pas aux ennemis de l'Iran, qui cherchent à mettre en scène de nouvelles provocations pour causer un maximum de dommages à ce pays et à son peuple.